mardi 2 octobre 2007

Till love tears us apart again

When the routine bites hard...

En quelques mots, Ian Curtis savait toucher les consciences, pulvériser le quotidien. Sa noire poésie alliée à une musique quasi-hypnotique, violente comme le rock, mais enfiévrée, répétitive et obsédante, cette voix rauque et caverneuse enfantée par un corps malingre, c’était Joy Division.

De Joy Division, je ne savais que peu de choses avant le film Control. Le concert des Bains Douches en 79 entendu un soir à la radio, l’histoire du chanteur qui s’était pendu, parce qu’il était malheureux... à 23 ans. Et ces chansons, fortes, envoûtantes et morbides. Groupe mythique de Manchester, mythique parce que la ville porte encore ses stigmates. Un chanteur dépressif, beau comme un jeune homme trop jeune et trop fragile. Mais pas l’épilepsie. Alors, tout s’explique.

Car ce film est aussi l’exposition brillante d’un équilibre ténu, l’histoire d’un homme dépassé par son talent, qui perd le contrôle de son existence lorsqu’il devient célèbre, le contrôle de sa vie privée lorsqu’il se retrouve tiraillé entre sa femme et sa maîtresse, le contrôle de son corps et de son esprit lors de ses crises d’épilepsie. Judicieuse la scène qui illustre la façon dont Ian Curtis a écrit She’s Lost Control.

Définitivement, pour moi, Joy Division était un groupe en noir en blanc, et Anton Corbijn, le réalisateur de Control, était certainement le mieux placé pour mettre leur fulgurante existence en images, noires et blanches. Après les pochettes léchées de U2, les clips au bord de l’overdose esthétique de Depeche Mode, Anton Corbijn a trouvé le noir et blanc crade comme il faut pour restituer la noirceur, le délabrement, le misérabilisme du Nord de l’Angleterre. Première et dernière images du film se répondent, toutes les deux sublimes. Et entre les deux, un film, une histoire portés par un acteur habité. Sam Riley est plus qu’un acteur incarnant un chanteur de rock défunt, il est chanteur de rock lui-même et il est originaire de Leeds. Qui mieux qu’un chanteur de rock pouvait jouer, mimer à la perfection la fièvre d’un concert. Ce choix nous épargne le ridicule d’un Val Kilmer dans le rôle de Jim Morisson, entre autres...

Control est un film sur le rock, quasi-documentaire mais toujours lyrique, hautement photogénique. Un hommage à la hauteur de son sujet. Gageons qu’après Ian Curtis, le prochain sur la liste est Kurt Cobain. La cicatrice Cobain étant encore vive dans le cœur du public, cela nous laisse quelques années de répit.


in : Angelina's musical fantasy

2 commentaires:

bertfromsang a dit…

mon premier souvenir de joy division remonte à un certain temps - 1991, à peu près: la découverte de "digital" avec sa mélopée: "day in day out day in day out...". quelques années plus tard, ce fut le coffret "heart & soul", écouté en boucle dans mes 9m2 d'étudiant, et qui m'accompagne encore. pour ce qui est du film, j'en suis ressorti gêné: j'avais l'impression d'avoir affaire à quelque imitation, talentueuse, certes: riley est doué, mais désespérément sans âme - et s'il existe un mot important, chez curtis... soit, je ne suis pas un grand amateur de biopic, même si l'aspect involontairement comique du "doors" de stone - qui porte bien son nom - est à surligner (on y rit beaucoup, me semble-t-il) mais j'ai apprécié par exemple le travail de l'excellent todd haynes sur "i'm not there"... un cinéaste intelligent et toujours surprenant: son traitement du cas dylan est on ne peut plus singulier... il commence là où corbijn s'arrête, en fait...

Angelina a dit…

Pas vu le "I'm not there" de Todd Haynes. Il est vrai que sa démarche semble déjà plus osée et plus engagée par rapport à un Corbijn plus conventionnel et plus illustratif.
Il est vrai aussi que Joy Division, une fois qu'on tombe dedans, on en ressort rarement.
Merci pour ta visite bertfromsang.