jeudi 22 avril 2010

En dansant sur un volcan (Ajami)

© Ad Vitam


Ajami est un film qu’on reçoit comme un coup de poing. On passe deux heures à rechercher son souffle. Les deux réalisateurs manient le public comme ils manient le scénario : ils ont l’art de retenir le récit, de le prêter puis de le reprendre. Ils savent bousculer le spectateur, le faire sourire et le laisser interdit la séquence suivante.

C'est comme si tout se passait dans un pays "normal", où il n'y aurait pas de "conflit" israélo-palestinien. C'est comme si les trois communautés, juive, arabe et chrétienne, cohabitaient dans un temps étiré à l'infini, qui n'aurait eu ni commencement et pour lequel il n'y aurait d'issue souhaitable. Les personnages semblent danser sur un volcan, mais la multiplication des points de vue, des angles de vue ne nous laissent à aucun moment nous installer dans nos certitudes.

Dans le quartier d'Ajami, à Jaffa, la guerre des clans, les flirts à la sauvette, les trafics de drogue, les émigrés clandestins, les disputes de voisinage qui tournent à drame rythment un quotidien violent, souvent sanglant. Pourtant le film n'est pas à charge. Il scrute ses personnages avec une curiosité sociologique presque scientifique.

Serge Kaganski (Les Inrocks) voit dans Ajami le salut du film de gangster. Pourquoi pas ? Jean Roy (L'Humanité) y lit le reflet d'une réalité que les habitants d'Ajami se coltinent jour après jour. Peut-être. Le contexte politique n'est en effet jamais évacué, il n'est pourtant pas caution, et bien souvent les personnages ont le choix avant de sombrer. Evidemment le fait qu'Ajami soit réalisé par un Israélien et un Palestinien vivant en Israël est assez emblématique pour être souligné. Plus qu'un symbole, un signe d'impatience, un passage à l'acte.

Comme je me refuse à raconter l'histoire pour vous en préserver toute la saveur de la découverte, vous allez être obligés,lecteurs cinéphiliquement amourachés, d'aller voir ce film. Et je vous souhaite de découvrir Ajami sans rien en savoir à l'avance, ou le moins possible, comme je l'ai fait.



in : Angelina's intense envy of cinema

3 commentaires:

ghadjo a dit…

Grand film où la violence est d'avantage subie que choisie, où la violence engendre la violence malgré soi parfois, sans effacer les traces d'humanité.

La Sauterelle a dit…

Envie d'aller voir et de faire l'experience, suite a ton article... mais je doute que le film passe pres de chez moi malheureusement!

Angelina a dit…

Je suis ravie de donner envie, moi.