jeudi 25 novembre 2010

Violence contre les femmes : Basta !

Il faut l’entendre leur souffrance. Il faut les entendre ces mots "combat", "se battre", "lutter" qui sortent de leur bouche lorsqu'elles parlent de leur nouvelle existence. Celle qui commence par "le premier jour du reste leur vie". Survivantes, rescapées, victimes mais héroïnes de leur propre histoire. Elles ont échappé à un conjoint violent.

Elles ont pris leurs cliques et leurs claques, elles ont franchi le seuil. Cette fois c'était la bonne, cette fois elles ne sont pas revenues. Cette fois, elles ont réellement sauvé leur vie. Les chiffres, vous les avez sûrement tous entendus : une femme meurt tous les deux jours et demi sous les coups de son conjoint en France. 140 en 2009.

Tout n'est pas rose pour autant.

Toutes sont détruites à l'intérieur, dévastées, psychologiquement meurtries. Victimes de ce que l'on appelle un « pervers narcissique », elles ont perdu la confiance en elle, l'estime d'elle-même, le sens de l'autonomie, les repères de la vie sociale comme la famille, les amis. Elles ont été isolées, dévalorisées, insultées, maltraitées, giflées, violées, et c'est un des aspects de la violence conjugale dont on parle encore le moins aujourd'hui.

Souvent elles n'ont pas de logement. Partir, c'est difficile quand on travaille plus, que l'on n'a aucun revenu et que l'on dépendait entièrement de son bourreau financièrement. Il manque des hébergements d'urgence et des logements de mise à l'abri. Il manque des passerelles derrière pour accéder aux logements sociaux car l'urgence ne devrait pas s'installer dans la durée. Or l'occupation des logements d'urgence aujourd'hui se décompte souvent en années car la logique ne suit pas les bonnes intentions. Des demi-mesures ne résoudront jamais les problèmes qu'à moitié.

Souvent elles ont des enfants. Elles doivent rester en relation avec l'ex-conjoint violent car celui-ci garde l'autorité parentale. Personne ne se pose la question de savoir si un compagnon qui frappe une femme peut être un bon père.

Et pour toutes celles qui partent, combien restent ?

25 novembre : journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. 2010 : la lutte contre les violences faites aux femmes est déclarée grande cause nationale par le gouvernement. 9 juillet 2010 : la loi "relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants" est promulguée. Une loi qui s'est beaucoup inspirée de ce qui se pratique déjà en Espagne. Votée en deuxième lecture à l'unanimité malgré certaines frilosités du texte qui selon certains députés, comme le PS Daniel Goldberg, n'allait pas assez loin, la loi a surtout été votée dans l'urgence. Car urgence il y a après des années et des siècles de silence.

Les avancées sont intéressantes : une ordonnance de protection décrétée par le juge aux affaires familiales, avant même le dépôt de plainte, saisi par la victime ou le ministère public. Seul hic, elle doit être prononcée rapidement mais on ne sait pas vraiment dans quel délai.

Cette ordonnance de protection doit permettre l'éviction du conjoint violent. Encore un hic ? Comment s'assure-t-on qu'il ne reviendra pas, même s'il en a l'interdiction ? On met un policier devant la porte ? On donne à la victime un téléphone portable comme cela est expérimenté dans le 93 ?

Les hébergements d'urgence doivent être multipliés. Les financements suivront-ils ?

Pour toutes ces raisons et bien d'autres encore, le Collectif national pour les droits des femmes a mis en place hier un comité de vigilance de la loi de juillet 2010. Il regroupe des parlementaires, des avocats ou des associations féministes afin de veiller à la bonne application de l'ordonnance de protection. « Les parlementaires ont souligné que dans leur circonscription elles prendront toutes les mesures nécessaires pour interpeller les Préfets, les bailleurs sociaux quant au logement. Elles étendront ces demandes, par le biais de leurs groupes respectifs, au niveau national. Les associations, chacune dans leur domaine de compétence, apporteront des témoignages sur l’application de la loi. Les magistrats et les avocats seront en première ligne pour juger de l’effectivité des mesures. » (1)


Le Collectif national pour les droits des femmes appelle également à un rassemblement devant le Ministère des Finances, aujourd'hui à 19 heures , place du Bataillon du Pacifique, pour demander que l'on se donne les moyens de la loi.


(1) : COMMUNIQUE DE PRESSE DU COLLECTIF NATIONAL POUR LES DROITS DES FEMMES



in: In the mood for anger

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