vendredi 3 juin 2011

L'intégration en France : une vision unilatérale from Minui

Il y a beaucoup à dire sur le sujet. Et si je me mets cet article en ligne, c’est l’occasion pour moi d’aborder non seulement un chapitre d’une histoire personnelle vers un état de fait en France.

Il y a beaucoup à dire, il y a beaucoup à débattre, mais c’est un débat important et intéressant. Il en va de l’avenir de la France aussi bien par nous, nos enfants et nos arrière-petits enfants ainsi de suite. La France en 2002 a vu l’extrême droite venir au plus près du pouvoir exécutif. Certains pourront me dire qu’il s’agit juste d’un point de vue sémantique en lisant les déclarations de Claude Guéant, Brice Hortefeux, ou Nadine Morano etc. Bref, ainsi donc, nous avons au pouvoir des « experts » de la nationalité, de l’immigration, nous avons même eu un ministère pour cela : Ministère de l’identité nationale qui maintenant s’appelle Ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Tous ces noms qui visent des populations qui posent des questions sur leurs identités en France.

On ne va pas faire dans le larmoyant, certains sont venus de leur plein gré, d’autres non etc. etc. Les jeunes des banlieues, le voile et tout ça quoi.

J’en viendrai directement à une question qui nous intéresse : Qu’est ce qui fait d’un Français un Français ? Une Lapalissade ? Malheureusement non. Beaucoup de Français apparemment se posent cette question… Cette question pourrait être légitime. Si l’on parlait d’un Français en voyage, si on parlait de la représentation française dans certaines institutions qui dirigeraient certains aspects culturels de la France etc. On peut noter que curieusement aux Etats-Unis on se pose encore la question de la naissance ou l’appartenance religieuse de Barack Obama. En France, bizarrement on ne se pose pas trop de questions sur Sarkozy. Je dois avouer que le Président actuel en 2011, veille du scrutin présidentiel de 2012, représente par bien des aspects le Français sur le plan international. Je ne m’égarerai ni sur son physique (trop facile), ni sur son côté démagogue (nous sommes en politique, c’est une seconde nature) mais en quoi est-il bien intégré (faut-il préciser qu’il est d’origine hongroise) ? Sa réussite ? Son divorce puis son remariage ? Son parlé (fautes de français incluses) ?  Ou simplement son mimétisme de l’opinion d’une certaine majorité qui prétend qu’il y a français et français ?

Y aurait-il plusieurs types de Français en France ? Comme les Anglais ont les Gallois, les Ecossais ou les Irlandais du Nord ? Non. Le torchon brûlerait-il entre Bretons, Corses, et Alsaciens ? En fait, chaque fois que nous abordons le thème, il y a une distinction qui se forme dans une opinion qui tente de rester sur le devant des médias en France : les Français de souche et les immigrés. Alors je ne sais pas pour vous mais la dernière fois que j’ai utilisé le mot « de souche », cela concernait les rats de laboratoire que j’analysais lors d’exercice de génétique en biologie. Pour rappeler à certain que la notion de races en biologie est totalement exclue pour l’ensemble des êtres humains. Ҫa n’est au mieux qu’un argument de vente communautariste pour certains médicaments contre le cœur. Et la distinction de certaines maladies orphelines plus représentées dans certaines communautés qui ont du mal à se mélanger. La question de différentes races humaines n’ayant aucun argument scientifique, nous pouvons au mieux affirmer qu’il s’agit de faire la distinction entre ceux qui ne sont pas blancs et qui parlent le français avec des accents ou qui ne s’habillent pas comme nous. Ce statu-quo tout à fait bas de gamme mais si accessible à notre chère population, a en effet de beaux jours devant lui. Cela ressemble à du racisme, ça a l’odeur du racisme, et… C’est du racisme. Et pour nous immigrés et enfants d’immigrés, il paraît qu’il faut vivre avec ? Pour ceux qui ont des parents comme les miens qui vous disent que le racisme a toujours existé aussi loin que remonte l’humanité. Que l’on est tous un petit peu raciste… Qu’on doit apprendre à vivre avec, à mettre de l’eau dans son vin etc.… Ceci est donc, l’un des premiers pas dans l’intégration, supporter le racisme. Supporter d’être comparé à un animal (les footballeurs, je pense peuvent en témoigner). Supporter d’avoir à être comparé, chaque fois qu’une personne dont la couleur de peau nous ressemble fait une connerie, à cette personne que nous ne connaissons souvent pas plus que les autres. A chaque fois que la nation ou le pays ou le pays voisin voire le continent d’où nous ou nos parents sommes issus, entre en conflits avec d’autres populations, il faut que nous justifiions notre camp. Supporter les remarques sur notre couleur de peau, notre cuisine, notre façon de nous habiller, nos croyances etc. Chacun de nos faits et gestes sont sous une surveillance que les complaisants (ceux qui peuvent vivre avec le racisme) connotent d’exotisme, et les racistes qui, du simple fait de notre différence, font déjà de nous des suspects potentiels, des criminels en devenir pour peu que vous ne veniez pas de la banlieue. Donc oui il faut qu’on s’intègre. Et cela donc fait partie de l’intégration. L’intégration c’est donc accepter non seulement les clichés, les stéréotypes, mais aussi les valider. C’est vrai que le Français doit absolument se vanter d’avoir du vin et du fromage à l’étranger. Il doit aussi sentir mauvais à l’étranger et avec tout ça il ou elle serait romantique… Ainsi dirons-nous qu’il est bien intégré dans son pays d’accueil ?

Au-delà de cette question de la différence. Nous avons une autre interrogation. En effet, en entendant cette fameuse réplique : "La France, tu l’aimes ou tu la quittes". Bizarrement, je me suis toujours demandé à qui s’adressait cette phrase. A Johnny Halliday, le résident suisse ? A ces touristes fortunés qui dépensent tellement pour venir admirer Paris le temps d’un petit congé ? Aux enfants de Johnny Depp et Vanessa Paradis au cas où ils ne suivraient pas maman ? Ou encore, à ces fameux jeunes de banlieue dont on parle tant qui hantent les cages d’escaliers de vos émissions préférées sur TF1, M6 etc. Alors donc, en plus de devoir supporter le racisme ordinaire, nous devons également choisir entre la France et notre soit disant pays d’origine. Sans avoir besoin d’entrer dans les considérations géopolitiques, juste un constat… Si la première génération s’est installée en France, elle a très peu de chance de repartir, et leurs enfants encore moins. Donc je ne sais pas pour vous, mais comment appelle-t-on une personne qui a grandi, a été élevée, éduquée, instruite en France ? Et qui généralement a ses papiers en règles, certificat de nationalité inclus, et pire qui vote en France ! Vous vous rendez compte ma bonne dame ? Eh bien… On ne l’appelle pas. On prétend vaguement que c'est un Français. Surtout s’il atterrit dans un poste à hautes responsabilités ou devient un personnage public. En fait la nationalité française est à géométrie variable. Quand ils sont sur le devant de la scène, des Jamel Debbouze, Yannick Noah ou encore Marie Pierce. Leur French Touch n’a absolument aucune ambiguïté. On leur parle de réussite dans l’intégration. Qu’ils sont un modèle français tralala… L’éducation française tralala… etc. etc. Par contre si vous passez aux 13h et 20h dans la rubrique faits divers (suivi d’atroce, horrible ou simplement tragique), vous êtes un jeune et généralement vous êtes d’origine… En fait le passage en case justice vous donne automatiquement l’AOC de votre pays d’origine. Et par la suite, on parle d’influence dans votre éducation, des lacunes dans les ZEP des cités etc. Mais surtout la question de l’origine de la délinquance entre autre posée par un certain Zemmour qui en a fait sa marque de fabrique. Vous avez beau être né en France, avoir grandi, ou vécu en France, vous n’êtes plus que d’origine…

Pourtant même si nous n’avons pas tous des ancêtres gaulois, ni romains, si nous n’avons pas tous les mêmes histoires avec lesquelles nous partagerions nos racines, nous avons appris le français en plus d’une autre langue pour la plupart d’entre nous. Alors que certains Français (qui se prétendent être de souche) sont encore analphabètes (je ne parle pas d’être bilingue, je parle juste de maîtriser le français). L’excuse de l’accueil de la misère étant un problème où la France occulte totalement son rôle dans la misère qu’elle-même provoque dans ces pays. Sinon Total serait-elle une ONG qui s’ignore ? Je ne parle même pas du chapitre de la colonisation ou de l’esclavage où la France a activement participé sans pour autant reconnaître l’influence qui perdure jusqu’à aujourd’hui… (Il faut lire le discours de Nicolas Sarkozy en Côte d’Ivoire, ou encore le traitement de l’esclavage dans les études en France). Plus récemment, la France dans la Deuxième Guerre Mondiale, un vainqueur qui s’ignore ? Si nous n’avons pas récupéré des biens qui appartenaient à des personnes envoyées dans des camps de concentration. Si nous ne sommes ni des descendants des Justes ou de Collabos. Si nous ne mangeons pas tous des escargots ou des cuisses de grenouilles. Si nous ne connaissons pas Molière par cœur. Si nous ne sommes pas tous blancs. Mais malgré tout cela, nous sommes aussi Français que le blanc du fin fond de sa campagne qui vote FN, alors qu’il n’a jamais vu un émigré de sa vie en vrai, passionné du saucisson sec et du pinard.

En fait, grandir avec l’histoire de France, et une culture française fait de vous un simple amateur de France. Vous êtes toujours rattaché à votre pays d’origine. « Retourne dans ton pays » disent-ils. D’après certains, on devrait choisir entre notre pays d’origine et le pays où on vit. Récemment Madame Le Pen a déposé une requête pour mettre fin à la double nationalité. Dans un pays comme la France faisant partie de l’Europe, où on a envoyé des princesses et des reines, épouser des rois et des princes pour des alliances ou traités de paix avec ses pays voisins. Marie-Antoinette l’autrichienne s’en souvient encore… Où on prône la liberté de circuler, où le brassage des populations n’est toujours pas fini. Charles Martel doit lui aussi s’en souvenir à Poitiers. La question paraît-il s’est posée après l’épisode des Français à la Coupe du Monde 2010 sur les quotas en équipe de France… Donc une fois qu’on a marié deux cultures visiblement les enfants doivent choisir entre les deux. La culture de nos parents et celle dans laquelle on grandit. Comme une espèce de refus de voir la coexistence d’un mélange, de ce métissage d’identités culturelles. Au-delà d’une idée de culture, de choix national,  c’est notre identité qui est refusée. Ceci est la vision d’une France qui aurait perdu son identité et qui cherche à la retrouver en recherchant son « peuple français ». Et demandant à ceux qui se posent la question de choisir. Même s’il s’agit généralement de la volonté de nos parents que l’on naisse ou que l’on devienne français, nous n’avons pas eu le choix de le devenir. Si nous n’avons pas le sentiment d’être tout à fait français (d’être comme tout le monde en somme), la plupart d’entre nous vivent avec ce sentiment chaque fois qu’on nous questionne sur notre origine. Nous ne pouvons pas dire simplement que nous sommes français. Dire qu’on est parisien ou breton n’est pas perçu de la même manière lorsque vous ne faites pas partie du stéréotype. Et quand à la solution d’indiquer notre pays d’origine comme étant notre pays d’attache ce serait simplement une erreur. Nous n’avons pas grandi dans ce pays. Au plus avons-nous connu nos premières années pour certains, mais la plupart ne connaissent que des histoires et des vacances.

Un pays qui refuse de se mélanger c’est tout simplement un pays qui a peur. Un pays qui a peur de ses voisins. Un pays qui a peur de ce qui est de l’autre côté des frontières. C’est un pays qui voit sa culture comme menacée, n’a tout simplement pas confiance dans sa propre culture. Sur ses moyens d’expansion, sur son rayonnement. Pourtant la France est un métissage de cultures, ce qui était des invasions a apporté leurs lots dans l’héritage culturel français. Ne serait-ce que dans les mots : ramdam, algèbre, bouquiner, ersatz etc. La France, celle que je connais est un mélange. D’abord européenne, et méditerranéenne, la France qui a puisé dans les ressources de son monde colonial, voudrait se passer de ce qu’ils sont devenus pour continuer à survivre ? Nous existons ! Et la plupart d’entre nous sommes issus de ces mélanges aussi lointains soient-ils. L’idée du problème d’intégration est un faux problème que vous nous demandez de résoudre en faisant un choix. Avant tout, laissez-moi vous dire que l’intégration ne peut être du fait d’une seule personne, et si on parle d’intégration, en France, on ne parle que du migrant. La question du pays d’accueil est totalement occultée. Et visiblement, "L’intégration pour les nuls" n’a pas encore été écrit (du moins pas en français).

 Mettons les choses au point : La France n’accueille pas ! C’est un pur mensonge. Si certains savent, il faut reconnaître que peu d’entre nous savent ce que c’est de se lever avant l’aube pour un rendez vous à la préfecture pour obtenir son titre de séjour, je ne parle pas de la nationalité. Les immigrés se débrouillent pour connaître leurs droits. Et vous savez quoi ? Ce sont les mêmes droits que les autres Français. Nos parents n’ont pas renoncé à leurs identités pour devenir français. C’est un droit. Un droit pour lequel la France a volontairement laissé libre parce qu’elle avait besoin d’eux. Et elle a toujours besoin. Demandez aux docteurs, ce qui se passerait dans les hôpitaux si on refusait les immigrés dans les services hospitaliers ? Dans la restauration ? Dans le bâtiment ? Dans les usines. Ce sont des postes qui demandent toujours plus de monde. L’image de l’immigré profiteur, si elle existe est une exception qui a mis en lumière les lacunes de nos administrations qui refusent (toujours) de partager leurs informations. Et pourtant nous sommes à l’ère de l’informatique. Je vais préciser qu’indiquer une personne par son origine n’enlève aucunement sa nationalité. C’est juste un refus de voir que le problème est véritablement français. La France n’accueille pas, elle a juste des institutions qui gèrent des dossiers. Vous n’êtes qu’un dossier parmi tant d’autres. Les gens qui arrivent avec des rêves, des fantasmes de Paris romantiques, y en a tous les jours. Et souvent, ils passent d’abord par la Gare du Nord (qui est au romantisme ce que le hamburger est à la gastronomie française). Se faire accueillir par la Gare du Nord pour un premier choc des cultures avec la France, c’est rude. Pour ceux qui ne connaissent pas, c’est comme si vous fantasmiez sur le meilleur des restaurants et qu’on vous invitait au MacDo. On est très loin du syndrome de Paris pour les Japonais. Alors l’accueil de la France, une légende urbaine ? En tout cas tout le monde en entend parler, personne ne l’a encore jamais vu. Quand à parler d’intégration…

Donc est-on bien intégré en France ? La France a cette position qui se résume dans le syllogisme suivant : Tout problème a une solution, nous n’avons pas de solutions pour l’intégration en France. Donc, nous n’avons pas de problèmes d'intégration.

Minui
de Siné


in: La part du fabulateur

2 commentaires:

Myrtille a dit…

et il y a aussi un amalgame fait entre intégration et assimilation, ce qui n'a rien à voir

lio a dit…

Il y a plusieurs problèmes qui se posent et ton article les résumes bien.

Déjà, il y a la " xénophobie" ou ce que j'appellerais le racisme ordinaire. Le Sociologue Norbert Elias parle d'endogroupe et d'éxogroupe. En gros une fois qu'un groupe est constitué tout ce qui vient de l'extérieur est porteur de préjugés et le bouc émissaire, d'où la nécéssité de l'intégration.

Ensuite, en tant que personne ayant travaillé dans les quartiers, au delà de leurs aspects stigmatisant, Je pense que c'est aux parents que devraient s'offrir les cours de langue française et s'adresser les efforts pour les aider à s'intégrer. Par ricochet l'assimilation des enfants sera plus simple.

Hélas dans une période économiquement difficile, la démagogie vend des voix, l'espoir est réduit à peau de chagrin et l'effort encore plus important pour ceux qui prônent la tolérance avec des associations dont les budgets se réduisent à peau de chagrin.
Comme ce que j'ai lu dans un article sur les quartiers nord de Marseille : " le temps du social n'est pas le temps du politique qui voudraient des résultats à court terme et visible là où il y a besoin de temps pour travailler en profondeur."

C'est un débat complexe et qui demande vraiment de multiples éclairages, j'espère avoir apporté ma contribution.