mercredi 4 avril 2012

Et je monte le chon...! (Et je re-mélenchon)

« Ce qui vient au monde pour ne rien troubler ne mérite ni égard ni patience »
René Char

 Fabuleuse soirée passée lundi au Bataclan. Ce 2 avril, le Front de Gauche faisait encore salle comble et bourrait la salle au nom de la culture. Riche en moments précieux, en interventions de qualité, en émotions partagées ou surjouées, forte d'un candidat volontaire et dévoué à la cause de la culture et de l'éducation pour tous, cette soirée aura aussi été un peu longue, un peu bavarde, un peu convenue, comme un peu toujours lorsqu'on parle de culture en France. C'est comme si on ne savait pas s'amuser dès qu'il s'agit d'intellect, de réflexion, d'art, de littérature, de parole, c'est comme si on était un peu empesé, un peu empêtré dans un costume que l'on sent trop grand au niveau des manches ou des épaules et qui s'ajuste mal à notre plus grande panique. Parler de culture en France, c'est quelque chose, c'est chiant !... Le Front de Gauche, quoique plutôt habile, quoique bénéficiant d'un discours vitaminé et amoureux d'un Jean-Luc Mélenchon en verve, n'aura pas tout à fait réussi à échapper à cet écueil. Qu'importe ?! Il n'en restera que les meilleurs souvenirs. Et le mieux sera pour la prochaine fois. Plus ludique, plus léger, plus tendre, plus participatif.

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Quel bonheur d'arriver boulevard Voltaire et de trouver 2 km de queue avant d'atteindre Bataclan. Forte de mon accréditation médiatique, je fais une entrée remarquée immédiatement suivie par Guy Bedos qui se précipite vers moi... pour serrer Clémentine Autain dans ses bras. J’aperçois également Pierre Laurent, Laurence Sauvage... J'apprends grâce à Twitter que Leila Chaibi et ses mélenchanteurs font un concert devant le Bataclan. Une amie me fait savoir qu’il y a Camélia Jordana, Yvan Le Bolloch et un acteur connu dont elle ne se souvient plus le nom dans la salle, mais je ne les vois pas. Sur scène se succèdent Ridan, Sanseverino. Albert Meslay me fait rigoler comme une baleine, mais pas autant que Paul Chevillard qui aura réussi un savoureux lapsus à double tranchant. Marion Mazauric, éditrice au Diable Vauvert prononce une longue diatribe remarquable et remarquée par ses accents de sincérité : "Si rien ne change après nous les fourmis...", décrète-t-elle. Elle est précédée par Hayat Dalfa, maire adjoint culture Saint-Ouen, qui manie l'émotion et le verbe avec maestra. Agnès Bihl chante Mozart et l'impatience se fait sentir. La seule évocation du candidat fait soudain monter un "Résistance" unanime et bouillonnant scandé par une mer de poings fermés qui se lèvent.

Le discours du candidat Mélenchon s'exprimant sur la culture sera tout sauf complaisant. Il se plaît même à narguer son public en le prévenant qu'il ne sera peut-être d'accord avant de décliner plus qu'un programme, une politique pensée comme une condition sine qua non. De la culture dans les écoles, mais aussi dans la rue. Abolition des barrières entre les créateurs et les usagers de la culture oui, mais pas seulement. Que tous aient la possibilité d'être des créateurs et de l'être pour tous et non pour eux seuls ou pour leur bourse. Le réalisateur Stéphane Arnoux, rencontré à la fin de la soirée y a lu la "politisation du travail artistique jusque dans les contenus, dans les oeuvres elles-mêmes. Ce qui devrait aller de soi pour les artistes, je ne l'avais encore jamais entendu dans la bouche d'un homme politique", explique-t-il. Mais en parlant de politisation, il évoque surtout "l'humain, les valeurs humaines, des sentiments individuels et collectifs. Redonner aux oeuvres un sens social, rendre compte de la vie sociale..." Le candidat Mélenchon propose une dynamique, s'invite à déclencher une impulsion, une volonté politique pour que l'art et la culture reprennent leurs quartiers dans nos vies. N'attendez rien d'en haut, c'est de vous que ça doit venir, a-t-il encore affirmé en repoussant le sobriquet d' "homme providentiel". Bref, tout reste à inventer...!

La salle se vide lentement à l'issu de ce discours bref mais percutant. Fatigué, le public maintenant agglutiné au bar en oublie même la culture, les performers ont un peu de mal à se faire entendre. Qu'importe ! Noémi Boutin et son violoncelle invoquent Bach et la grâce lors d'un touchant et timide discours sur la ghettoïsation de la musique classique. Je la croise dans la salle et n'ose l'aborder pour lui dire combien elle a été émouvante. Mais nos regards se croisent et nous nous sourions comme si nous n'avions pas besoin de nous le dire. D’ de Kabal me remue les tripes. Didier Porte est aux abonnés absents. Jusqu'à ce que je décide de trouver dès le lendemain tous les disques de Marc Perrone sur Le Bon Coin. Je ne le connaissais que de nom, je comprends mieux pourquoi il est si aimé. Il essaie de faire chanter "Le temps des Cerises" à ce qu'il reste d'assistance. Le public répond avec coeur mais dans la plus grande débandade à mon avis, de là où je suis tout du moins. Personnellement, je ne connais pas les paroles et je me contente de marmonner.

Cela rejoint ce que l'on se disait avec Stéphane Arnoux. Mélenchon fera peut-être 15 %. Mais  avec cette campagne, il se sera passé quelque chose. Le début ou la suite de quelque chose. Jamais candidat aux présidentielles n'aura autant fait oeuvre d'éducation populaire, de pédagogie, ne sera autant parvenu à raviver cette histoire populaire qui fait écho à Howard Zinn, à fédérer des milliers de gens derrière des valeurs que l'on croyait périmées. Rouges mais ensemble !

A quelques mètres de moi, l'ancien Sénateur communiste Jacques Ralite a assisté à la soirée, attendant patiemment le discours de Jean-Luc Mélenchon avant de s'éclipser. La salle lui a réservé une ovation digne et nourrie. Une proximité de quelques heures qui restera un souvenir émouvant.








in: Bulle d'information

2 commentaires:

Alain a dit…

on prend tous du volume ;-)

rauden a dit…

Ah heureusement que tu es là, Angelina, pour nous faire vivre, d'une plume aiguisée, ces bons et doux moments.