mercredi 30 mars 2011

Légitime colère

Le deuxième album de la Zone d'Expression Populaire (ZEP) est sorti ce lundi 28 mars. Alternatif et indépendant, Saïdou a choisi de zapper les "grands" médias. Rencontre.

Une rencontre avec Saïdou, l'autre voix du Ministère des Affaires Populaires, cela ne se refuse pas. Toujours sur le départ, encore là mais bientôt ailleurs, il m'attend Place de la Nation, sa petite valise à roulettes à la main. Il me voit et son grand sourire apparaît. Saïdou, c'est ce grand type à casquette qui jouait hier à Bobigny pour soutenir les militants de la campagne BDS (1) et avec qui je m'apprête à passer plus de deux heures à la terrasse d'un café. Simplicité, disponibilité, et générosité sont les moteurs de l'artiste, qui a su rester accessible et surtout très humain.

D'entrée je le questionne sur Nique la France et le souvenir que j'ai gardé du lancement de la tournée à la Belle Etoile l'année dernière. « Je vois bien que tu me cuisines, mais cela ne me dérange pas. Je vais te répondre. » Une discussion à bâtons rompus. Ce qui ne devait être qu'un verre amical et un "une autre fois" s'est transformé en un véritable entretien-fleuve. A moitié journaliste ce jour-là, je n'ai pas osé enclencher le magnétophone. Toutes les citations de Saïdou que tu liras ici, lecteur fan de ZEP, de MAP et de rap musette militant, sont de mémoire.

Un an après la sortie, en pleine identité nationale, de son livre-disque Nique la France, dans lequel il était au micro quand le sociologue Saïd Bouamama était au stylo, Saïdou repart donc en campagne, un nouvel opus sous le bras. Sa Zone d'Expression Populaire a subi quelques changements. « L’équipe a bougé. Alee, le troubadour, n’est plus là. Les musiciens ne sont pas des pros, mais c'est un parti pris. » Comme s'il voulait échapper au succès et à la professionnalisation, Saïdou est aujourd'hui un réfugié volontaire au sein de sa ZEP. « J'en ai un peu marre qu'on me tende toujours le micro pour me demander de m’exprimer sur tout. Je fais de la musique et ce que j'ai à dire, je le mets dans mes textes. » Très peu d'interviews donc l'année dernière après la sortie de Nique La France. Un skud et le silence. Puis une série de conférences avec Saïd Bouamama, l'auteur du livre. Aujourd’hui, c’est tout seul qu’il défend son dernier bébé, et dans un tout autre contexte puisque au moment de la rencontre, nous sommes entre le printemps arabe et une guerre en Lybie.

***

Le bébé promet. J’adore cette écriture nerveuse, qui débite comme s’il allait manquer d’air, qui martèle parce que les mots font mal, bien sentis, bien ajustés. D’un bout à l’autre de ses deux albums, le rappeur s’adresse à un alter potentiel qu’il tutoie, qu’il apostrophe, toi l’auditeur, toi le public, toi le témoin. Il fait péter les rimes, claquer les mots. Ils s’entrechoquent, ricochent, se dédoublent et réfléchissent, se reflètent, se répondent et interpellent. Parfois ils sondent et ils déminent. « Je suis un terroriste », me dit-il.


Une semaine que l’album tourne dans ma tête. En tête, un Bezzef phare qui devrait faire bouger les foules. Fédérateur juste pile où on a envie de dire merde à Guéant et à sa clique. Aujourd'hui, point de livre. Ni de titre d'album provocateur. Quoique ! "Bezzef" ça veut dire stop, ça suffit, acabo ! Vindicatif et prémonitoire, il relève les compteurs. « (...) quand la masse est en marche silencieuse, quand elle hurle en cachette, moribonde et pleurnicheuse, quand elle chuchote la colère comme un tabou, comme un secret, quand elle abdique, cadavérique, quand la révolte est prohibée. Autocensure, alien, comme la pire des prisons, les murs invisibles sont plus solides que le béton. Ils enchaînent, ils enferment dans le silence. Ils emprisonnent, et graves sont les conséquences. Les prols se lepénisent, les forces se divisent. »

Comme pour lui donner raison, le résultat des élections cantonales confirme la montée d'un Front National qui ne fait même plus honte. En plus de dénoncer un pouvoir qui se fascise, Saïdou pointe un racisme latent sous couvert de la bonne conscience. Il fustige un état d’esprit général imprégné par un colonialisme auquel la France n’a pas su renoncer. Même durant les plus glorieuses heures de la lutte antiraciste, les Français n’ont jamais réussi, selon lui, à s’affranchir d’un comportement paternaliste, caractéristique des rapports entre côlon et colonisé. « Il ne suffit pas de dire qu'on n’est pas raciste, il faudrait que les "blancs" reconnaissent qu'ils se réservent un statut de privilégiés. » Impressionnant, l'homme a la dialectique affûtée, il joue de son charisme, il tétanise avec les mots, prêt à parer toutes les contradictions, à contredire les argumentations qui mettent en doute. Je questionne le terme "blanc", que je trouve réducteur et dans lequel je ne me reconnais pas. Lui me parle de mon petit égo blessé et considère, au contraire, que c'est une réalité qu'on n'a pas le droit de dénigrer. « Mes grands-parents ne savent ni lire ni parler français et pourtant ils ont une véritable conscience de classe. J'ai une grande admiration pour eux. Ma grand-mère, un jour, m’a dit "Je suis noire". Elle a tout compris de ce qui se passe autour d'elle. » S'il adhère au discours des Indigènes de la République, il ne s'en réclame pas ouvertement. « Ce sont mes frères et soeurs, et je les soutiens. »

Nique La France, le livre, participait déjà de ce refus d'un "néocolonialisme" banalisé. Aujourd’hui, un débat sur l'identité nationale et une loi contre les burqas plus tard, sans compter le Burger King hallal, l'apéro saucisson et pinard et les prières de rues (pour tout éclaircissement sur ces références, merci de m'envoyer une demande par mail), Saïdou croit encore moins en la politique pour réduire les inégalités et lutter contre la xénophobie. Ecoeuré devant une droite qui drague le facho et par une gauche qui se tait, il préfère se retrancher sur les valeurs auxquelles il croit, et ne plus rien attendre des institutions. Anar, mais sans drapeau noir. Son pavé dans la mare ce sont des brûlots, des diatribes, des textes persifleurs censés remettre les pendules à l'heure.

Retour aux racines

DR
Dans cette chanson, on sent le vent qui balaye le continent africain. Il vient souffler dans nos rues, dans nos salons, dans nos chambres. A la limite du repli, le texte revendique un héritage vécu comme une « potion pour encaisser le choc, pour faire bloc contre leur culture de masse qui est en toc. » Virulente apostrophe, elle dénonce la récupération, l'avilissement des cultures vite revisitées, vite consommées. Raccourcies, résumées et vendues comme des petits pains sous le label "world music" de Mariam et Amadou à Ya Raya. « Electrochoc, quand je vois les miens qui se défroquent, (...) qui troquent leur sarrouel pour un succès en plastoc. Génocide orchestré par Libé et les Inrocks ». Pour l'auteur, ces valeurs, celles qui n’ont pas été galvaudées, lui sont devenues le seul repère fiable. Comme un eden virtuel et protecteur. « Le retour aux racines n’est qu’une question de survie, quand l’oxygène se fait rare, quand le climat t’asphyxie. » Dans ce contexte, tous les débats sur la laïcité sont vécus comme autant de stigmatisations. « Va dire à nos censeurs qu’on est toujours dans le secteur. Exister, c’est exister politiquement, porter sa lutte, fièrement et dignement. Comme Angela Davis, offensive et outrageante. Rien attendre de la classe dominante. Mais pour nous endormir, ils nous ont mis quelques larbins (...) au service de la machine, du patron et du côlon. Demande à Rachida combien elle prend pour une inflation. Demande-lui ce qu’elle en pense de ce pseudo-féminisme, indignation sélective, imposture antiraciste. Elles veulent sauver les Iraniennes des méchants islamistes pendant que nos soeurs se font shooter par les sionistes. » Et toute tentative de stigmatisation de la part des "laïcards" est une véritable provocation. Il confirme : « La religion ne touche que l’intimité. Elle n’a rien à voir avec le monde public. Je ne vois pas pourquoi on devrait organiser des débats sur le propos. » « Insoumission au diktat intégration », clame-t-il encore dans la chanson. Pourtant ce mot, aujourd'hui vécu comme une injonction par les immigrés et leurs enfants, cristallisait au moment où il a été lancé dans le discours politique, les devoirs de la République envers ses immigrés et non l'inverse. Contestable dans son acceptation contemporaine, "intégration" a d'ailleurs été rejeté au profit de "diversité", qui ne sonne pas mieux.

Le regard résolument tourné vers le sud, ZEP envoie une belle baffe dans la gueule d'une France un peu trop satisfaite d'elle-même, volontairement sourde et aveugle. « Cette France, je ne l’aime pas. Je ne la reconnais pas comme mon pays, parce qu’elle ne me reconnaît pas. Mais c’est ici que je vis. Je ne crois pas au pseudo-pouvoir des urnes, au droit de vote. Voter, ça ne prend qu'une demi-seconde et, chaque fois, on en prend pour cinq ans. » Comme l’expliquait Said Bouamama, « la solution n’est pas de changer les mentalités pour changer la société, mais bien de changer la société pour changer les mentalités. » « On ne fait pas partie du problème mais de la solution » pourrait même se payer le luxe de rajouter l'un de mes lecteurs.

"Contre une réalité impitoyable qui bousille rêves et utopies, contre l’urgence arbitraire et insatiable qui sabote idéaux et projets de vie", ZEP administre des cataplasmes bouillants, cautérise la douleur par la catharsis, égrène des chapelets de soupirs, plus doux que l'ire, et disperse des semences de nostalgie. Tout comme Zaf-Zafi qui est l'adaptation d’une chanson algérienne des années 30 sur l’immigration, Ya Baba pourrait être la lettre d'un Sans-Papier à son père. « Me suis retrouvé à Paris, dix mètres sous terre, Ya Baba, comme les souris. Pas de lumière, pas de soleil, pas d’été. Ni bonjour, ni bonsoir, ni mots gentils. » Ce morceau est un magnifique petit bijou. L’écriture est fine et précise, travaillée par un orfèvre. Les détails disent tout. La musique est plus que belle.

Après Nique la France, titre spontané, vengeur et ravageur, Saïdou a de nouveau ressenti le besoin de tremper sa jolie plume dans l’acide, l'humour et l'amertume. Au final, l’album est-il celui d'une colère noire, brandie comme une oriflamme ? « Je ne suis pas en colère », me susurre-t-il, un doux sourire un brin moqueur collé sur les lèvres. « Le matin, je me lève pessimiste et je me couche optimiste. » Angela Davis, Aimé Césaire, Mahmoud Darwich et Frantz Fanon. Ses références dessinent la pierre d'angle d'un véritable programme politique fait de revendication, de vigilance et d'indignation. Mais surtout,« toujours debout ». Pas de colère, mais de la dignité.

Je gère, dernière chanson de l'album, n’oublie pas d’égratigner un système qui fait si mal à la culture populaire, qui méprise les arts urbains, relégués au rang de folklore, qui adule le politiquement correct, médiateur de la pensée et de la parole uniques. Avec virulence : « Transgresser leurs règles parce qu’elles sont pas les nôtres, parce qu’elles nous excluent, nous bâillonnent et nous ligotent, parce qu’elles nous assignent et nous imposent le silence, la discrétion, la politesse et la patience. » Avec autodérision : « J’ai pas le talent pour faire danser dans les campings, pas très doué en com’ et marketing. Antisioniste, je crois que c’est pas très vendeur, pas très sexy pour faire carrière chez les crooners. (...) ça risque d’être compliqué pour choper le disque d’or. Ҫa y est je crois que c’est foutu pour signer dans la major, pour côtoyer le gratin, pour tutoyer la pègre, Bolloré, Bouygues et le chéquier de Pascal Nègre (...) » Ce "système" qui ne vend plus mais donne du prêt à penser que l'on ramasse et que l'on abandonne sur les banquettes du métro, qui conditionne. « Je crois aux réseaux alternatifs » explique Saïdou. « J’ai délibérément choisi d’éviter les grands médias. » Parce que les grands médias, c’est déjà la compromission avec le système qu’il dénonce. Comme il le chante encore : « Pour faire trembler l’institution, j’ai choisi l’alternative, les réseaux indépendants, les canaux populaires occupés par les vrais gens. Autonome, solidaire et militant, subversif, impertinent et dissident. Les tubes et les singles, moi je sais pas faire. J’ai pas la côte sur Skyrock et France-Inter. »

Palestine, ma direction

Palestine, « mon sens, ma boussole, ma devise, mon exemple, mon symbole, ma direction, ma route, mon emblème, ma logique, ma référence, mon modèle, là où je puise toute mon inspiration (...) » L’une des chansons phares des concerts de ZEP. Immuable depuis le premier album, elle figure également sur celui-là, toujours précédée par le poème de Mahmoud Darwich, Inscris ! Je suis Arabe. Cette fois, il est récité par les Palestiniens du groupe Gaza Team. Un poème puissant dans lequel le poète s'adresse directement au colonisateur. Palestine encore, dans la chanson Tu dois partir, où il est question d'une sauterelle, habile métaphore sur les colonisations. Celles d’hier et d’aujourd’hui. Le regard panote de l’Algérie aux territoires occupés.

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Poésie, grincement de dents, raillerie et autodérision pointent sous les saillies. L'album aurait pu être lourd, brosser un tableau noir, déprimant s'il avait été exempt d’humour. Aïe aïe,aïe, les pièces inénarrables, diablement rythmées et hilarantes : la part du fromage, la famille ou même le très controversable Je me soigne. Un portrait lapidaire de l’Hexagone : « Encore pire que la gale, j’ai le virus hexagonal, de la fièvre coloniale, sexiste et libérale, allergique aux Musulmanes, aux SDF et aux Tsiganes. Hé ouais, camarade, je suis Français mais je me soigne. » Effectivement, tout le monde devrait se soigner de cette France-là. Après on pourra toujours objecter, et j'objecte encore, qu'amalgamer cette partie de la France avec l'ensemble de la société peut s'avérer réducteur, voire contre-productif. Cela met en opposition certaines catégories de la population, là ou il faudrait plutôt les faire converger, et surtout cela arrange bien les affaires des véritables racistes. Dénigrer en bloc une société parce qu'elle est imparfaite, inaboutie, menteuse, trompeuse et souvent mal-intentionnée ne peut servir, à mon sens, qu'à entretenir le clivage et continuer à faire grimper un FN, une UMP qui depuis des mois stigmatise les Français d’origine arabe. « Le problème », me répond Saïdou, « c'est que même au sein de la convergence, il y a cette discrimination qui fera que je serai toujours derrière les autres. Ceux qui veulent que je brandisse un drapeau rouge ne me mettront jamais en avant. » Indéniablement, notre société a besoin de se faire décoloniser de l'esprit, de ne plus penser une grande partie de sa population comme des minorités qu'il faut gérer, mais d'abord et uniquement comme des citoyens. Il y a beaucoup de choses qui font profondément du bien dans le discours de ZEP. D'autres qui me laissent plus dubitative. C'est pourquoi, je le redis, je prends le meilleur et je laisse le reste. Lorsque je suggère à Saïdou que le public qui danse en concert n’écoute ou ne comprend peut-être pas toute la portée des paroles, la question le blesse, et la réponse est cinglante : « Tu fais preuve de condescendance en pensant que tu comprends des choses que les autres n'entendent même pas. Je peux t'assurer que le public entend les paroles. Je le sais parce que je le vois quand je suis sur scène. Je vois les gens réagir. » D'ailleurs, « je ne suis pas là pour faire danser les bobos », m'avait-il lâché un peu avant.

Ah oui mais, faudra faire avec alors. Parce que cette musique s’attrape comme une fièvre et se danse à l’insu de son plein gré. Saïdou est parfaitement conscient qu'il touche surtout, pour le moment, des trentenaires plutôt politisés voire militants, et pas encore les jeunes des quartiers qui, pour le moment, s'abreuvent de Skyrock et s'enfilent la totalité du catalogue Universal. Mais, pour le moment, il peut assurément compter sur le soutien d'un noyau dur de fans, qui va en s'agrandissant au fil des concerts.

Passions

Si aujourd’hui la musique reste l’essentielle de ses passions, le leader de ZEP se voit comme un éternel passeur. Il veut témoigner, transmettre, n'être plus qu'un médiateur. « Je me verrais bien faire du documentaire. Parce que je commence à avoir un peu de légitimité sur le terrain, parce que je pense que j’inspire confiance. » Fort de son expérience en Palestine où il a été en contact avec la population de Cisjordanie, il a déjà jeté les bases de ses nouveaux projets. Au gré des ateliers d’écriture qu’il pratique avec des collégiens en ZUS (zones urbaines sensibles) ou dans les prisons, il recueille des paroles qui l’enthousiasment. « J’ai fait un atelier à Bordeaux avec des collégiens. J’ai rencontré un gamin de 12 ans d'origine comorienne qui était quasiment considéré comme irrécupérable. A la question « Quel serait le monde idéal pour toi ? », il a répondu : « Un monde où les blancs seraient gentils. » Une jeune fille de 15 ans m’a dit « Le racisme pousse les gens à se refermer sur eux-mêmes et leur fait perdre leur confiance en eux. » Ces jeunes comprennent le monde dans lequel ils évoluent. Ils sont capables de  synthétiser en quelques mots ce que des chercheurs mettent des années à retranscrire. »

En attendant, reprendre la vie commune avec MAP n'est pas exclu. « HK, c’est la famille. Il se pourrait bien qu'on refasse quelque chose ensemble très vite. » Demain, MAP ? Aujourd'hui, la route avec ZEP qui était à Bobigny mercredi dernier pour protester contre les conditions d'accueil et le traitement des dossiers des étrangers à la Préfecture de Seine-Saint-Denis. Aujourd'hui, c'est Bezzef, et de la musique pour réfléchir. Efficace.


PS : Après notre rencontre, j'ai reçu un message de Saïdou : « Petit contrôle d'identité à la sortie de la gare ! :( "Vous avez de la drogue, une arme, vous êtes connu de nos service ?" No comment... »

(1) Boycott Désinvestissement Sanction milite pour le boycott des produits en provenance des territoires occupés.  



in: Qui êtes-vous ?

lundi 28 mars 2011

Petit ballet électoral de circonstance

Pour ce lundi de lendemain de fête électorale, je vous offre une vidéo où chacun en prend pour son grade. Une cinglante ritournelle qui fleure bon l'anar méchamment dég. A droite à gauche, c'est la chorégraphie tendance de la semaine. En attendant 2012...



Syrano, ça a été une réelle découverte, une caresse plutôt qu'une claque, une étreinte un peu appuyée, un baiser un peu forcé puis passionnément accordé.

Ceux qui m'ont demandé ce que j'ai fait vendredi il y a deux semaines seront enfin récompensés de leur attente. Ceux qui s'en foutent voire ne veulent pas savoir doivent fermer les yeux. Vendredi, il y a deux semaines, j'étais là. En voyage. Je me suis assise et j'ai écouté. J'avais la tête qui tourne. J'ai mordu ma lèvre et je n'ai pas senti la douleur de la morsure. Je savais que j'étais soûle, je me suis laissée partir dans cet étrange flottement qui m'emmène vers ce que je ne contrôle pas.

Vendredi il y a deux semaine, la Bellevilloise s'est transformée en un vaisseau déchirant des récifs, fendant la peau d'une onde tumultueuse comme une écorchure, chevauchant des rouleaux d'amertume, grinçant d'envies de révolte, gémissant d'une douleur sereine, craquant du désespoir et de l'espoir mille fois revenu. Je me suis laissée enlever. Epuisante ronde, danse tourmentée, pas de deux, à trois, à cinq, à dix. Hésitante valse, union timide. 

Mais ils me tenaient, ils ne m'ont pas lâchée. Du violon entêtant au flow cabré d'un rap nerveux, poétique, presque intimiste. Flirt incessant avec la chanson française et lyrisme de quelques mots. Je me suis laissée faire, le rire aux lèvres.  


Avec son physique de brute au coeur de poète, façon Genet, il vous replonge dans l'univers de l'enfance l'air de rien, vous chante les odeurs et les voix, vous tente avec la tristesse sur des airs qui chaloupent. Il entretient des rapports amoureux avec son public, descend de scène pour distribuer baisers et câlins. Vu qu'il transpirait, j'ai même gardé son ADN sur ma joue. Flanqué d'un faux double, Cherzo, qui décante et décuple son propos, d'un violoniste et d'un accordéoniste, entre autres, il vous embarque pour là où les mène leur fantaisie.

Autour du monde et dans sa tête, grâce à un blog en forme de carnet de voyage, en attendant le quatrième album. Un voyage qu'il raconte également dans le magazine FrancoFans, "le bimestriel indépendant de la chanson francophone actuelle".


in: Gloomy monday

dimanche 27 mars 2011

Le courrier - IV (première partie) from Zoé Cyrano

Enfin tout savoir. Le fin mot de l'histoire est dans le dernier numéro du Courrier de Zoé Cyrano, qui décide de clore par ce quatrième épisode une saga sexuelle pleine de mystère et d'exaltation.


Cette année comme les précédentes, je me préparais à fêter mon anniversaire chez moi avec quelques amies et amis, chacun et chacune amenant son petit quota de nouvelles têtes. Quelques semaines s'étaient écoulées depuis la dernière rencontre avec mon inconnue, et je n'espérais plus vraiment de nouvelles de sa part, elle avait du trouver une autre gazelle à chasser, et je dois dire que cette pensée me contrariait bien davantage que je n'aurais voulu l'admettre. Au moins, mes appétits s'étaient calmés, et je n'avais même pas cherché à me distraire de quelque mâle de passage, non que je sois devenue lesbienne, mais je suppose que l'intensité des quelques moments passés avec cette femme m'avait rendu bien fade ce que le reste du monde semblait prêt à m'offrir. Et quant à me mettre moi aussi à chasser, c'était hors de question pour le moment, j'avais pris trop de plaisir au rôle de proie. Mes premiers invités allaient bientôt arriver, je balayai donc d'un geste ces idées parasites, et c'est en maîtresse de maison accomplie que j'accueillis successivement presque une vingtaine de personnes, parmi lesquelles finalement peu de vrais proches, et quelques découvertes.

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Le début de soirée fut extrêmement prévisible, mais en l'occurrence cela me convenait tout à fait. Quelques paquets cadeau s'entassaient négligemment sur la table basse du salon, près des bouteilles de vin déjà copieusement entamées, les conversations allaient bon train dans un brouhaha que je connaissais bien, et dont je goûtais chaque harmonique sans bouder mon plaisir. Un petit groupe s'était classiquement formé dans la cuisine, et fumait joyeusement tout en faisant un sort au stock de bières du frigo. J'allais et venais d'une pièce à l'autre, attentive à ce que personne ne manque de rien lorsqu'une amie me tira par le bras, quelques âmes impatientes ayant décidé qu'il était grand temps que j'ouvre enfin mes cadeaux, pour la plupart habituellement symboliques mais d'autant plus chargés de signification. J'avais moi-même soudain hâte de découvrir ce qu'on m'avait réservé, connaissant le caractère gentiment moqueur et imaginatif de certains. Et je ne fus pas déçue, je passerai sur les nombreux accessoires tous destinés à me rappeler ma condition un peu trop longue de célibataire, trop longue à leur goût il va sans dire, le point d'orgue étant un calendrier personnalisé d'un éventail de photographies de moi, principalement en maillot à la plage, recadrées ou manipulées de façon à en faire un superbe calendrier de routier ! Je ne pus m'empêcher de repenser aux photos que j'avais envoyées au début à mon inconnue... quel calendrier il aurait fait ! Une soudaine vague de chaleur s'insinua au creux de mon ventre à cette évocation, je souhaitais vraiment la revoir, jusque dans ma chair, la sentir encore frissonner sous mes caresses, boire encore à sa source, espérer enfin un baiser, un vrai, à pleine bouche, à la Française parait-il... je me sentais patriote !

Les cadeaux étaient tous déballés, du moins le croyait-on, lorsque quelqu'un remarqua un petit paquet déposé à l'écart, enveloppé de kraft rouge... est-ce la matière qui mit soudain mes sens en alerte, je pressentis l'improbable, que j'aurais cru impossible quelques minutes plus tôt, et c'est prise de vertiges que j'ouvris mécaniquement l'emballage sous les regards curieux d'au moins dix personnes, pour découvrir avec soulagement une simple paire de menottes, que je savais heureusement être la seule à pouvoir reconnaître... celle-là même qui m'avait maintenue attachée au pied de mon lit pendant que mon inconnue se faisait copieusement baiser dessus, à moins d'un mètre de moi! Naturellement, les commentaires salaces ne manquèrent pas de fuser, mais aucun de mes joyeux lurons n'avait pu voir qui avait déposé là ce paquet, et l'énigme se perdit dans l'excitation de la soirée, quelques invités nous avaient déjà quittés et il était plus que probable que le responsable était du nombre. Quoiqu'il en soit, elle ne m'avait pas oubliée, et cela m'apporta un réconfort inattendu qui me laissa rêveuse un moment, dévisageant tout de même chacune des nouvelles têtes du soir, des fois que... de fait, quelques unes des filles présentes auraient fait de bonnes candidates, mais je trouvais à chacune un détail, un style, un trait de caractère qui la disqualifiait pour le rôle de ma mystérieuse correspondante.

Les derniers fêtards repartirent au matin, peu après les premiers métros. Je débarrassai machinalement quelques verres mais décidai finalement qu'une bonne matinée de sommeil me donnerait plus d'énergie pour finir, je n'étais pas vraiment fatiguée mais encore dans la fête, et pas du tout disposée à tout ranger si vite. J'avais aussi encore la tête pleine de souvenirs, ceux qu'avaient ravivés la paire de menottes de la veille, et c'est avec elles en main que je m'allongeai nue sur mon lit, songeant à la dernière fois que je les avais portées, ici même.

A suivre....
La semaine prochaine, tout sera révélé.


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in: The closer I get

jeudi 24 mars 2011

Sous le cygne d'Aronofsky



Je m'en souviens très bien, de ce jour de décembre. Nous étions, Le Caméléon et moi, au bureau comme d'habitude, tous deux l'oeil rivé sur mon écran d'ordi. Nous étions en train de découvrir la bande-annonce du prochain film de Natalie Portman. LA Portman, Amidala, celle qui avait fait Brothers, la fille de Léon quoi ! Le Caméléon n'a pas tenu plus d'une minute : "Ouais c'est bon, j'ai pas envie d'en voir plus. Ҫa a l'air d'être de la merde." "Mais grave, Le Caméléon", lui rétorquai-je dans un sursaut de lucidité. Je laissais néanmoins une chance à la bande-annonce. Une danseuse en tutu blanc, une danseuse en tutu noir, la musique du Lac des cygnes, des répétitions, un regard en gros plan dans un miroir, du sang qui coule. Ҫa tournait fort au thriller glauque où c'était vendu que la nana en tutu noir allait bassement oeuvrer pour piquer le rôle de la nana en tutu blanc, jusqu'à coucher avec elle pour mieux la destabiliser. Après ça finirait en gros règlement de compte, carnage du tutu noir qui blesse le tutu blanc, mais on se doute qu'à la fin elle mourra pas et que malgré toutes ces coups bas, c'est le tutu noir qui y passera après avoir reçu 50 coups de couteau, encaissé 36 balles de revolver, bu 2 seaux de strychnine. On n'était pas loin du compte. Le Caméléon était absolument effondré car la bande-annonce venait de lui apprendre que c'est l'un de ses réalisateurs préférés qui avait fait le film.

Un mois plus tard, le film sort. LA Portman s'étale en gros plan et en cygne partout dans le métro et sur les flancs des bus. Le buzz commence à gronder. LA Portman fait la ballerine, danse comme un cygne et le film est à voir ab-so-lu-ment. Le buzz grossit toujours. Black Swan, c'est le it-film de février.

Le Caméléon et moi, on se regarde, tous surpris. Serait-ce que nous aurions été dupés par une bande-annonce bidonnée ? Enduits d'erreur par un marketing mal intentionné ? Devant l'enthousiasme général, je cède. Un samedi soir, je prend mon sac et je mets les pieds au cinéma.



***



On n'avait jamais filmé la danse comme cela. En utilisant les subterfuges de la cinématographie pour ne pas la filmer. Gros plans, contre-jour, jusqu'à la caméra embarquée messieurs-dames. Du corps de la danseuse, on entend tout, les poumons qui se remplissent d'air, le coeur qui bat, même les doigts de pieds qui craquent. Je raille, mais au début du film j'étais plutôt respectueuse. J'allais voir du film d'auteur, du Darren Aronofsky.

Je vous la fait courte. Le malaise s'installe vite. Quelques petits indices nous attrapent. On attend... longtemps. On se demande à quoi sert Vincent Cassel. Et au final, à quoi sert-il ? Pendant ce temps, la pauvre Portman est totalement sous pression. Elle souffre de plus en plus physiquement...

Jusqu'à ce qu'Aronofsky nous dise, à un peu plus de la moitié du film, clairement où il veut aller et qu'il nous y emmène en se contentant de dérouler son idée jusqu'à l'apothéose finale. Il ne s'épargne même pas le grandguignolesque de la scène finale. Evidemment Natalie a eu l'Oscar. Les Américains raffolent de ce genre de rôles. Et puis c'est quand même dommage pour Winona Ryder ce film.



***



Par curiosité, je suis retournée sur Twitter pour pécher les meilleures critiques :
  • Résumé : Natalie Portman essaye de se masturber, est interrompue à chaque fois... en est toute frustrée et devient folle. Fin.
  • Viens juste de voir black swan....ne sais pas trop quoi en penser...< lol ok je sais !
  • Finalement vu Black Swan. Brillant. Drôle de silence après le film.
  • Aujourd'hui, je suis allé voir Black Swan avec mes parents, je n'avais pas réalisé que c'était surtout un porno
  •  viens juste de voir une pub sur black swan ... des souvenirs bizarres sont en train de me revenir.
  •  ••• 2 filles et 1 Black Swan •••
  •  Je viens de voir Black Swan, comment est-il possible d'être une aussi bonne actrice comme Natalie Portman ? Incroyable.
  • Pourquoi Black Swan n'est pas interdit pour les moins de 12 ans ? #MamanJaiPeur


    Mais la vraie raison de tout ce qui précède, la voilà. La vraie critique du film, celle du Caméléon. Car lorsque je suis revenue au bureau pour lui dire de ne pas aller voir ce film, il y est allé le soir même. 

    Black Swan. Alors nous revoilà à l'époque de l'Actor Studio : "Wouah, pour jouer ce personnage, il n'a pas hésité à prendre 50 kilos !" Encore heureux : c'est son job.
    Black Swan. Elle, elle s'est quand même bien défoncée pour savoir jouer la ballerine. Mais, encore une fois : encore heureux, c'est son job !

    Black Swan, c'était bien plus regardable que True Grit. Mais surtout, Black Swan, j'adore... la musique. C'est bien réalisé, c'est sûr. Y a pas d'erreurs. C'est bien joué. Mais l'histoire, je la connaissais déjà. L'actrice qui se fait mal pour bien jouer. L'actrice qui devient folle afin de bien endosser son rôle. J'exagère, parce que, il m'arrive de surkiffer des histoires non-surprenantes, mais là... si après le film, il reste ce goût de non-surprise, il restera aussi l'oubli : comme tu l'as dit, je pense qu'il en restera pas grand chose. A part l'excellent travail sur le son. Et à part la musique. Mais pour elle, notre ami russe avait déjà fait le boulot au siècle dernier. Le dernier film d'un de mes 4 réalisateurs préférés n'effacera pas les sensations que j'avais depuis l'enfance associées aux plaintes et aux mélodies de ce cygne meurtri. En revanche, si demain, un chroniqueur télé parle d'Annie Girardot en collant la musique du Lac des Cygnes, alors, peut-être, de nouveaux souvenirs se grefferont. En attendant, une actrice oubliée est morte (un peu comme Winona Ryder), mais une nouvelle en devenir se confirme : pour les 40 prochaines années, on va se bouffer du Natalie Portman, et, c'est tant mieux. Je ne sais pas si au regard des autres actrices de la sélection des Academy Awards elle mérite tant son oscar, mais j'm'en fous, (malgré sa grosse tête) elle ne m'a pas déçu, je la kiffe encore, et encore. Je ne reverrai pas ce film, sauf peut-être avec mon ami qui a adoré ce film : bah oui, il faudra qu'il m'explique, point par point, séquence par séquence.


    Voilà, c'est tout.



    in: Angelina's enthusiastic envy of cinema

    mardi 22 mars 2011

    N’être

    Amel est une jeune mère de famille, elle élève avec son mari deux charmantes petites filles. Lui travaille comme ouvrier, elle reste à la maison pour s'occuper du dernier né de trois mois. Leur séjour en France est totalement légal : ils disposent d'une carte de séjours de dix ans. A la cité des Francs-Moisins, à Saint-Denis, où ils habitent, tout cela est relativement habituel, du moins on pourrait le croire, car cette famille vit en fait un cauchemar : leur nourrisson est un « touriste de passage pour 3 mois ».

    Amel est enceinte de sept mois quand elle doit partir en urgence en Algérie au chevet de sa mère gravement malade. Elle ne sait pas que ce voyage la conduira dans un monde kafkaïen. Elle accouche prématurément en Algérie à sept mois. Après cet épisode difficile à vivre, elle a hâte de rentrer auprès de sa famille. Hélas, la loi française ne le permet pas. Son enfant étant né à l'étranger, elle ne peut le ramener directement. Elle doit attendre un visa provisoire pour l'enfant, si elle veut revoir ses filles. Sinon, elle doit entamer une procédure de rapprochement familial. Amel s'effondre. Elle vit une dépression. Il faut absolument rentrer. Son mari et ses enfants lui manquent. Elle choisit le visa. Le retour à la maison ne résout pas le problème, loin s'en faut : une cascade de difficultés l'attend. La préfecture lui signifie qu'au terme du visa, elle doit retourner en Algérie et demander pour l'enfant le regroupement familial, ce qui peut prendre beaucoup de temps. En France, le bébé n'a aucun droit, même pas celui d'être rattaché à la Sécurité sociale de son papa, puisqu'il y est en séjour provisoire.

    C'est cette situation qu'Amel me raconte un soir de janvier, quand elle m'amène le bébé qui a de la fièvre. Je le soigne et, bien forcé par la situation, je rédige l'ordonnance au nom de sa grande sœur en espérant que le pharmacien ne tiquera pas trop sur la posologie inadaptée.

    Et je m'indigne ! Comment cela est-il possible ? Cet enfant a un papa qui travaille, qui cotise à la Sécurité sociale, qui a des droits. Je me renseigne auprès des personnes connaissant mieux que moi ces situations : eh bien, non, cet enfant n'a pas de droit, car il a eu le tort de naître où il ne fallait pas. Nous faisons le « forcing » à la CPAM du 93 pour procurer une couverture sociale à ce bébé car, si par malheur il devait être hospitalisé, le coût serait rédhibitoire. Il faut du temps et de la pugnacité, mais heureusement, nous y arrivons, car aujourd'hui, l'enfant est hospitalisé pour une infection des voies respiratoires. Mais cela ne change pas la situation du bébé qui va bientôt être clandestin, puisque tout le monde conseille à Amel, même les institutions sociales, de ne pas retourner en Algérie.

    De toute façon l'état psychologique d'Amel ne le permet pas, état psychologique encore plus aggravé par la décision de la Caisse d'Allocation Familiale, qui demande le remboursement de la prime de naissance (eh oui, il y a là suspicion de fraude !) et qui, pour être certaine d'être remboursée, supprime le versement des autres prestations. Nous supposons que, comme d'habitude, quand il y a un problème déclaratif ou autre, la CAF suspend tout les allocations, fait son enquête, et prend sa décision. On remarquera qu'habituellement, en vertu des principes constitutionnels, il faut d'abord faire l'instruction avant de prononcer le jugement, mais pour la CAF, les principes constitutionnels sont accessoires ! Outre que la suppression arbitraire des prestations auxquelles elle a droit enfonce un peu plus cette famille dans la précarité, la violence institutionnelle qu’elle traduit projette Amel et les siens dans l’incompréhension et la détresse.

    Comment en est-on arrivé là ? Dans quel monde vivons-nous, pour fabriquer des bébés clandestins ? Quelle faute Amel a-t-elle commise pour être autant punie ?

    Je voudrais connaître celle ou celui qui au consulat de France a refusé de délivrer les papiers à cette jeune mère de famille. Il ou elle a appliqué la loi, me dira-t-on. Quelle loi ? Celle qui est écrite sur le fronton de son bâtiment : liberté, égalité, fraternité ou celle d'un Etat français redevenu ouvertement xénophobe. Je voudrais comprendre ce qui se passe dans la tête de tous ces acteurs de la préfecture qui, au nom de la France, perdent leur humanité. Les lois et les règlements ne cessent de brimer les étrangers. La France a-t-elle si peur qu’elle doive craindre la venue sur son territoire d'un nourrisson de trois mois ? Voit-elle en lui un possible perturbateur de l'ordre public ?

    Comment peut on oublier à ce point les missions et les valeurs de la protection sociale, pour que la CAF se conduise de cette manière, est-ce le poison de la suspicion face à la fraude qui provoque ce comportement d'exclusion ?

    Que puis-je dire à cette famille ? Que ce monde est devenu fou, de cette folie qui conduit à ne plus savoir faire la part des choses. Que la loi fixe les conditions de la vie en société, mais qu'elle n'est jamais à l'abri de devenir stupide et ignoble dans son application. Que la citoyenneté que les hommes et les femmes politiques prétendent défendre n'existe pas pour un bébé né de parents maghrébins.

    La loi que nous allons appliquer pour cet enfant, c'est la loi de la cité, celle qui est faite de solidarité, de soutien, d'amour et de fraternité. Et nous allons nous mobiliser pour rendre à ce bébé ses droits, pour que son arrivée dans la vie ne soit pas à jamais marquée par la culpabilité d'être né où il ne fallait pas.

    Docteur Didier Ménard
    Médecin généraliste à la cité des Francs-Moisins à Saint-Denis


    Communiqué de presse du 17 mars 2011

    Par la diffusion de ce témoignage, le Syndicat de la Médecine Générale soutient ouvertement l’initiative d’un de ses membres, le Dr Didier Ménard.



    in: In the mood for anger

    dimanche 20 mars 2011

    L'amour à Rome

    Pour faire une pause entre deux épisodes du Courrier de Zoé Cyrano, mais pour rester sur le même thème, voici une petite bande-annonce qui ne dénotera pas dans mes dimanche soirs sexuels.

    Room in Rome (2010), joue sur les mots, les langues et les corps. Une Espagnole et une Russe s'enferment dans une chambre à Rome (mais au fait, on s'en fout) pour y expérimenter une sexualité alternative. Enfin, c'est selon...

    Pour ma part, je vous ai déniché la bande-annonce russe, bien moins prude que l'anglo-saxonne. Personnellement, je ne donnerai pas mon avis sur ce que m'inspire cette bande-annonce, d'abord parce que je n'ai pas vu le film, ensuite parce que ce n'est pas le propos. Mais pour vous donner une idée, disons que j'ai hâte de retrouver la suite... et la fin du Courrier de Zoé Cyrano, la semaine prochaine.








    in: The closer I get

    jeudi 17 mars 2011

    Militants, ya basta !

    Cela aurait pu être une histoire de bruit et de fureur racontée par un idiot : un syndicat a été envahi. Pour se défendre des trublions qui ont renversé ses pots de fleurs, ce syndicat n'a fait d'autre choix que celui d'assigner devant un tribunal les deux seuls zigotos qui ont pu être identifiés : l'un, Michel Roger, fondateur de la Compagnie de théâtre Jolie Môme, pour avoir parlé dans un mégaphone, l'autre, Ludovic Prieur, animateur du site d'actualités alternatives hns-info, pour avoir raconté la scène sur son site internet. C'est néanmoins ce qui est arrivé à la CFDT qui a attaqué des travailleurs pour "violation de domicile" alors qu'elle est censée les défendre. Au risque de créer une jurisprudence et de rendre l'occupation de locaux, l'une des armes favorites de la lutte syndicale, délictueuse à l'avenir. 

    Seulement la CFDT s'en est prise à l'écharpe rouge de la Compagnie Jolie Môme, qui joue mais aussi milite et dont le fief à Saint-Denis ne désemplit pas chaque fois qu'il s'agit d'y lever le poing pour saluer la mémoire de la Commune ou pour fredonner Ya Basta. De cette affaire est né Wanted, un spectacle qui se veut le procès du militantisme à travers les âges.


    Loin de moi l'idée de caricaturer la CFDT même si elle a tenu ce jour-là le mauvais rôle de la pièce. Le fait qu'elle ait opté pour la confrontation plutôt que le dialogue avec des intermittents mécontents, rappelle des méthodes que l'on s'attend à trouver plutôt du côté des patrons.

    Le symbole de ces deux militants que patronat, syndicat, mais aussi médias opportunément absents, ont voulu faire taire et qu'aucune menace n'a pu faire taire, en dit long sur le rapport de force qui s'établit aujourd'hui entre les "puissants" et les "faibles".

    Alors que le tribunal correctionnel avait, en première instance, donné raison à la CFDT en condamnant nos deux personnages pour violation de domicile, le jugement de la 13ème chambre de la Cour d’Appel de Paris a finalement infirmé ce jugement et débouté la CFDT, le 17 septembre 2010.

    Aujourd'hui, ce sont quatre militants de la campagne BDS (Boycott Désinvestissement Sanction) qui comparaissent devant le Tribunal de Bobigny pour avoir appelé au boycott contre les produits en provenance des territoires occupés. Il n'y a qu'en France que cela arrive par la magie d'une circulaire rédigée par Michèle Alliot-Marie qui amalgame appel au boycott et discrimination raciale, qui criminalise un mode d'expression, de protestation et de résistance pacifique.

    Les procès intentés aux militants du BDS se multiplient. Mais seul un jugement a pour le moment été rendu. Le 14 octobre 2010, la Sénatrice Alima Boumedienne-Thiery, et le militant du NPA Omar Slaouti, ont été relaxés par le Tribunal correctionnel de Pontoise.

    « La question en la matière, et quelles que soient les formes d’intervention choisies, est politique. Dans ce domaine, comme dans tous les sujets de caractère politique, la liberté d’expression doit être impérativement respectée », indique un communiqué de l'AFPS (Association France Palestine Solidarité).




    L'Appel de Bobigny par belkacem_93


    Lire mon article publié sur Bakchich pour en savoir plus.




    in: The world is crying out loud

    mardi 15 mars 2011

    lundi 14 mars 2011

    Un long lundi de trouble

    La première fois que je l'ai entendu, je n'ai pas cessé de me creuser le cerveau en me demandant qui le chantait avant. Et même en cherchant sur le net, tout ce que j'ai trouvé c'est ça. Qui n'a rien à voir donc. Une chanson so cold wave qui sonne si bien et si fragile dans la bouche de Keren Ann. J'étais persuadée que quelqu'un l'avait chantée en mieux.

    Tout ça pour dire...

    Jolie chanson. Nouveau look, nouvelle démarche. Personnellement, je n'aime pas la pochette de l'album avec le revolver, je n'aime pas la vidéo. La chorégraphie me fait rigoler. Il n'y a que les gros plans derrière le stromboscope qui me parlent un peu. La douce Keren a l'air échappée du harem de Bryan Ferry du temps où il était encore slave to love, avec son rouge trop rouge et son noir qui menace de couler.

    Mais Gloomy Monday tout de même. Un brin sensuel, un brin provocateur, un brin cinoche. Parfait pour la semaine !







    PS : Ce My name is trouble m'a permis de replonger dans du vieux Keren Ann. Je ne suis pas fan, c'est pour ça que j'étais passée à côté de ça, que j'aime beaucoup mieux.







    PS du PS : Moi j'avais écrit un poème qui disait "Lay your head on my hand". On comprend mieux pourquoi j'en suis là et elle, là où elle est.


    in: Gloomy monday

    dimanche 13 mars 2011

    Le courrier - III (deuxième partie) from Zoé Cyrano

    Nous avons laissé la narratrice du Courrier au bord de la jouissance, à l'occasion de la visite de sa mystérieuse inconnue et de son compagnon. Après des préliminaires qui laissent augurer d'une mémorable séance d'orgie, la jeune héroïne s'attend à être consommée et à devenir le jouet consentant de ses deux invités.

    NB : Il est toujours fortement conseillé de sortir couvert, et de toujours mettre un préservatif lorsque l'on a des relations sexuelles sans connaître la sérologie de son partenaire (HIV et hépatites entre autres).
     
    © Man Ray, Le baiser
    Plusieurs fois déjà (...)




    Ce texte a été dépublié afin de ne pas choquer les âmes prudes. Si vous voulez lire la suite et si vous êtes en âge de le faire (18 ans et plus), visitez le blog de Zoé Cyrano.


    in: The closer I get

    6 ans aujourd'hui !



    in: The world is crying out loud

    jeudi 10 mars 2011

    Révolution économique au Togo

    Un ouvrage qui proposerait de faire des politiques publiques un levier du développement. En voilà une bonne idée. Une idée qui serait la conclusion d'une étude approfondie de la gestion des finances publiques. Oui mais au Togo !

    Comment ce livre d'économie m'est-il tombé entre les mains ? C'est simple, son auteur est mon ami.  Jeune juriste financier togolais, Sasso Pagnou n'a pas ménagé sa peine pour venir achever ses études à Lyon puis à Reims. Les principales difficultés qu'il a rencontrées pour rédiger sa thèse se sont principalement avérées d'ordre matériel : logement, finances, outre le fait qu'il était étranger dans une ville où il ne connaissait personne. 

    Sasso Pagnou
    Tous droits réservés

    Aujourd'hui, Sasso voit la consécration de cinq années de labeur puisque les Editions universitaires européennes viennent juste de publier sa thèse. Actuellement professeur de droit à l’Université de Kara dans le nord du Togo, Sasso propose, dans sa thèse, ni plus ni moins qu'une modernisation du système économique togolais et prône l'application des principes de transparence et de bon usage des deniers publics. Ce qui peut sembler une évidence, et qui, bizarrement, dans les faits, n'en est pas une.

    Plus qu'une analyse de l'économie et de la gestion des finances, ce livre se révèle également comme la photographie d'un jeune Etat d'Afrique de l'Ouest. Longue bande de terre coincée entre le Ghana et le Bénin à l'ouest et à l'est et le Burkina Fasso au nord, le Togo qui fut, pour partie, une colonie française, est indépendant depuis les années 60. Or, l'échec des politiques publiques au Togo aujourd'hui s'explique aussi par le fait qu'une part importante des budgets publics provient de l'aide au développement.

    Personnellement, j'ai une proposition à faire à Sasso. Quand il aura finit de faire la révolution économique au Togo, qu'il vienne la faire en France !




    in: L'ivre

    mardi 8 mars 2011

    8-mars : Souviens-toi de ne pas oublier...

    8 mars... blablabla.. tous les ans c'est pareil... tous les ans on n'y échappe pas. Et comment faire du neuf, d'une année sur l'autre avec du sempiternellement pareil ?

    © sansdoute
    Certains droits réservés 

    Gnagnagna... la journée dela femme... gnagnagna... extraordinaires... merveilleuses... courageuses... gnagagna... concilient vie de famille et vie professionnelle... gnagnagna... égalité salariale... parité


    Jusqu'ici, j'ai toujours préféré voir le verre à moitié plein plutôt qu'à moitié vide. Cette année, j'ai décidé de laisser parler les autres. Petite revue de presse déphasée du 8-mars.

    Drôle, sobre et percutant, la journée commence bien grâce au dessin de la p'tite Blan. Mais surtout, j'adore son petit commentaire percutant. Piles, les deux, dans l'actualité. Bien vu !

    Pas vraiment un billet sur le 8-mars, mais un billet qui parle de mère et de fille. Rien que pour ça, j'adhère. Lire la note du 8 mars de Sarah, rien que pour la phrase d'introduction.

    Tandis que, pour célébrer le 8-mars, l'équipe rédactionnelle de Elle avait décidé de pousser des coups de gueule afin de dénoncer tout ce qui l'escagasse et lui complique hautement la vie de merveilleuse rédactrice de magazine de L'Oréal et que Libé se contentait de reproduire les avatars d'une vie de meuf tirés du site du même nom, le quotidien Nord Eclair consacrait un article sur l'inégalité salariale en France, chiffres à l'appui. Résultats, ça se tient à peu près sur l'ensemble du territoire où une femme gagne entre 72 et 78 % du salaire d'un homme. Sauf en Corse, à la traîne de la catégorie, puisqu'une femme monte en moyenne à 82 %.

    Ginie, Perfect Housewife, retrace en quelques clichés cinquante ans de l'évolution de la femme vite fait. Bon, c'est fait.

    Olympe fait une petite mise au point de la bonne conscience, redéfinit les enjeux, ébauche une stratégie et repose les cartes sur la table. A nous de jouer !

    Un article d'Agoravox recense 8 champs de bataille, 8 raisons de se battre, 8 raisons d'être de la journée de la femme en France. 8 comme le 8-mars. Cela allait sans le dire, mais ça va mieux en le disant.

    Anaïs dénonce les promoteurs du 8-mars. Quelques louchées de dérision bien senties. Et ne manquez pas de lire son billet de l'année dernière dans la foulée. Il est pas mal gratiné aussi.

    Le merveilleux site de Sandrine70, A dire d'elles, nous parle de poisson d'avril et nous présente la magnifique campagne anglaise... contre l'inégalité salariale. Eh oui, over the Channel aussi ! Et James Bond va en faire les frais. 

    Le site Egalité, quant à lui, milite pour un retour à une règle grammaticale tombée dans l'oubli et pourtant usitée par Racine, afin que le masculin ne l'emporte plus sur le féminin au pluriel. La parité grammaticale, un combat à ne pas négliger.

    Evidemment, des billets sur le 8-mars, sur des blogs féministes et décapants, des sites d'information bien intentionnés, il y en avait quelques milliers d'autres. N'hésitez pas à coller les perles que vous avez aussi récoltées en commentaires.


    Et pour finir un peu d'actu : 


    Le 8-mars, tout le monde se plaît à le fustiger. Mais il suffit que ce soit notre bien-aimé-président qui le fasse pour que tout de suite ça sonne moins classe. Encore à côté de la plaque où l'art de fustiger pour les mauvaises raisons. Pas de souci, tu auras encore droit à une chance l'année prochaine. 

    Enfin, on avait commencé la journée en se disant que la femme of ze day allait être inévitablement l'inévitable Marine Le Pen. Hé bien perdu !!!! les parieurs petits-bras. Marine s'est fait voler la vedette in extremis par une brunette, Chantal Brunel, qui, pour lui couper la chique, n'a rien trouvé de mieux que de proposer un petit retour vers l'envoyeur... mais en bateau. A lire l'interview du Nouvel Obs, on comprend tout de suite qu'il ne faut pas avoir peur de réutiliser les mots déjà utilisés par le Front National, sinon les forces lexicales vont venir à manquer pour tout le monde. C'est vrai que, bizarrement, "bateau" c'est aussi évocateur que "charter". Chantal doit sûrement être une des seules à se demander pourquoi. Et puis, c'est vrai aussi que si elle n'avait pas dit "bateau", on n'y aurait vu que du feu... et ça aurait été dommage pour l'UMP, tiens.


    in: In the mood for anger

    lundi 7 mars 2011

    Printemps, sève, hormones

    L'homme du jour est mystérieusement nommé Log Book. Homme de l'ombre, mais surtout homme des livres, homme des mots, à la recherche de traces écrites sur toutes formes de support : livre, disque, numérique... Aujourd'hui pour mon Gloomy Monday, il accepte d'être l'invité de mars. Il sera donc aussi l'homme du printemps, avec un peu d'avance. Le titre du jour, c'est Song 2 de Blur.

    DR


    Je viens de découvrir ou redécouvrir ce titre. C'est très simple, plein d'énergie, d'adolescence. La chanson est courte mais c'est une belle petite chanson qui a tout du rock et de la jeunesse. Elle est sensuelle, sexuelle, entraînante et très simple. Pourquoi faire plus ou plus long ?

    Cette chanson c'est la vie, le printemps. Elle est de "rigueur". On sent monter la sève en soi quand on l'écoute et les hormones travailler. Elle est là pour ça, aussi, cette petite chanson. Elle est parfaite dans le style bim booum patatrac et hop. C'est tout à fait le style musical de Blur : une musique de deux minutes.

    Oui j'aime les Anglais. Ils sont pauvres, jeunes et se retrouvent devant des milliers de personnes et peuvent enfin bouffer et payer un cottage à leur parents ouvriers. C'est merveilleux à cet âge d'avoir une telle aventure et de sortir de la pauvreté. Elle dit tout ça cette chanson. J'ai toujours pensé ça des groupes de jeunes. Surtout que Blur avait du pognon, je crois. Mais c'est pas le problème. Le truc, c'est ce qui ressort de cette courte et forte musique. Ҫa doit être extraordinaire à 20 ans de vivre une telle aventure. C'est sans nom.









    in: Gloomy monday

    dimanche 6 mars 2011

    Le courrier - III (première partie) from Zoé Cyrano

    Elle revient, Zoé Cyrano, pour nous livrer la suite des aventures de sa narratrice aussi audacieuse que libertine. La jeune femme reçoit des courriers d'une inconnue qui la somme de se soumettre à des jeux sexuels plus inventifs et mystérieux les uns que les autres. De quoi éveiller les sens et la curiosité de notre héroïne.

    NB : Il est toujours fortement conseillé de sortir couvert, et de toujours mettre un préservatif lorsque l'on a des relations sexuelles sans connaître la sérologie de son partenaire (HIV et hépatites entre autres).


    © Isabel Muñoz

    Lorsque les premières lueurs de l'aube vinrent enfin colorer les murs de ma chambre, je n'aurais su dire si j'avais ou non pu trouver le sommeil, tant j'avais ressassé les événements de la nuit passée.
    ....

    Ce texte a été dépublié afin de ne pas choquer les âmes prudes. Si vous voulez lire la suite, envoyez-moi un mail en cliquant sur ce lien, et en précisant bien que vous avez 18 ans ou plus.

    Vous voulez lire les nouvelles érotiques de Zoé Cyrano ? Vous avez au moins 18 ans ? Cliquez là.


    in: The closer I get

    mardi 1 mars 2011

    Taboo Dolls from Minui

    Revoilà Minui qui nous livre à nouveau l'une de ses effrayantes petites histoires d'anticipation. Aujourd'hui, il fait dans la néosexualité.

    [mode fiction on]
     

    "Repoussez les frontières de vos tabous. Prenez le contrôle de votre plaisir. Succombez à l'égoïsme !

    Soyez aimé(e) pour ce que vous êtes ! Nos Taboo Dolls sont générées à partir de vos cellules. Développées dans des incubateurs à croissance rapide, elles seront opérationnelles en moins de 3 semaines pour réaliser vos fantasmes les plus inavouables. D'une durée de vie de 3 mois extensible à 12 mois grâce à notre programme Cells refresh. Elles sont prédéfinissables à vos envies et préprogrammées pour vous désirer. Vous serez entièrement au centre de leurs attentions les plus délicates ou tout simplement vos fantasmes les plus interdits."



    - Bonsoir, Patrick Loyd pour KLNews, ce soir notre invité n'est autre qu'Adam Welch, fondateur de (+)Leisure (prononcer Plu-easure), leader sur le marché du sexe sur mesure. Bonsoir Adam ! Vous êtes ce soir notre invité pour intervenir sur ce phénomène de société les 'Nymphes', vos Taboo Dolls, que vous fournissez pour assouvir les fantasmes de vos clients.

    - Je vous remercie de m'avoir invité. Je suis très heureux que les Taboo Dolls soient devenus un phénomène de société. Cela prouve bien que nous apportons une réponse à la société.

    - L'avis du public est divisé. Des polémiques mettent en cause les Taboo Dolls à cause de l'immoralité des pratiques sexuelles pour lesquelles elles sont utilisées. La secte du Néocatholicisme vous accuse notamment de pervertir le patrimoine génétique humain au nom du profit, que leur répondez vous ?

    - Je suis étonné d'une telle réaction, l'ironie d'une telle accusation est criante. Venant de la part d'un courant qui a lutté pour la restauration d'une Religion entachée de plusieurs scandales dont notamment plusieurs accusations de pédophilie. Les Taboo Dolls auraient offert des subsituts remarquables à leurs représentants et auraient épargné un bon nombre de victimes et de tabloïds indécents.

    - Ne craignez vous pas que l'utilisation des Taboo Dolls soit détournée ? A des fantasmes plus violents voire à des actes illégaux ?

    - Le fait qu'elles soient faites à partir des cellules des clients crée bien entendu un lien fort avec ces derniers qui n'est pas sans rappeler un certain tabou comme l'inceste, mais la comparaison s'arrête là. Les Taboo Dolls n'ont pas d'existence, sinon leurs désirs préprogrammés. Il s'agit tout au plus, d'une forme de masturbation évoluée qui n'a rien d'illégale. Nous respectons la vie privée de nos clients. Il s'agit là d'une approche Neofreudienne du complexe d'Oedipe ce qui est tout à fait normal. L'utilisation des Taboo Dolls rentre dans un cadre tout ce qu'il y a de plus légal. Elles sont faites pour assouvir les fantasmes d'asservissement les plus tabous. Mais elles n'ont pas la possibilité d'être des ascendants psychologiques. Pour simplifier, dans l'espèce animale, il existe les dominants qu'on appelle alpha, les dominés, bêta et les Taboo Dolls se situeraient plutôt au niveau gamma.

    - Des esclaves sexuelles dociles en somme...

    - Il s'agit là effectivement d'un fantasme qu'elles peuvent réaliser.

    - Le Reverend Lewis McDougal vous accuse de favoriser la violence sexuelle en laissant celle-ci s'exprimer. Souhaitez vous lui répondre ?

    - Le Reverend McDougal fait partie d'une caste qui devrait comprendre que l'interdiction rend le refoulement encore plus difficile. Et interdire l'expression d'une frustration ne permet pas à cette dernière d'être comprise la laissant devenir un mouvement actif de revendications violentes. Je pense notamment aux pédophiles, pour qui nous fournissons une solution épargnant les réseaux de tourisme sexuel dans les pays ou régions sous-développés. Aujourd'hui je fournis une réponse à cette violence. Que peut bien prétendre le Reverend avec ses lois anti avortement et anti préservatifs ?

    - D'après mes sources, les Taboo Dolls sont aussi expérimentées à des fins thérapeuthiques. Pouvez vous nous en dire plus ?

    - Il s'agit là pour le moment d'une phase d'expérimentation menée par le professeur Heston qui étudie les comportements violents de patients internés pour des crimes graves. Des tueurs en séries et/ou des violeurs multirécidivistes. Les Taboo Dolls sont utilisées dans un cadre strictement thérapeutique, mais surtout d'observation et de test. En aucun cas, elles ne sont utilisées comme défouloirs à des désirs pathologiques.

    - Mais ne repoussez vous pas les limites de ce que vous appelez justement des désirs pathologiques ?

    - Nous parlons de deux comportements distincts l'un relève du fantasme où la Taboo Dolls va simplement exprimer ce dernier, alors que dans le cas d'une pathologie incontrôlée elle nécessitera à terme un traitement voire un traitement chimique. Pour simplifier l'explication, le désir vu par la Taboo Doll, cette dernière n'est qu'une simple poupée qui vous dira 'oui'. Est-ce vraiment un désir pathologique ? Non, il s'agit simplement d'asservissement contrôlé alors que la pathologie sera, elle, incontrôlée.

    - Pour finir, les Taboo Dolls ont actuellement le vent en poupe mais ne craignez vous pas qu'il ne s'agit là que d'un effet de mode ?

    - Aucunement, nos prévisions corrélées à des audits sur le terrain et nos résultats actuels indiquent qu'il s'agit là d'une nouvelle forme de sexualité entrainant des nouveaux modes de consommation. Par ailleurs, nous sommes à la pointe de nouveaux plaisirs. Pour le public masculin nous lançons également une nouvelle gamme d'excitant tel que 2ndorgy qui simule l'orgasme féminin beaucoup plus puissant, chez l'homme.


    [mode fiction off]

    L'homme n'a pas fini de jouer à la poupée mais lorsqu'il ne restera que des poupées, qui jouera ?


    Minui

    Retrouvez toutes les nouvelles de Minui sur son blog, Mind of Concrete.



    in: La part du fabulateur