Aux parents, aux professionnels de l’éducation nationale et spécialisée et à tous ceux qui se sentent de loin ou de près concernés par le présent et l’avenir de nos enfants…
Je suis mère de 3 enfants, aujourd’hui âgés de 17, 15 et 12 ans. J’ai mis ma carrière d’éducatrice en « stand by » il y a 9 ans, pour pouvoir m’occuper d’eux, ma profession étant ce qu’elle est, l’exercer entraînait trop de temps d’absence de la vie familiale.
Les années ont passé et j’ai perdu le contact avec l’enfance en difficulté. Certaines lois ont changé, la CDES s’est fondue dans la nouvelle Maison du Handicap. J’ai suivi tout cela de plus ou moins près, sachant que je n’ai plus du tout le pied dans le monde de l’éducation spécialisée.
Pourtant, je sens monter une colère incontrôlable quand je vois ce que l’on veut faire à l’école avec les enfants en difficulté d’apprentissage !
Je veux parler de la nouvelle organisation de la semaine scolaire : moins d’heures d’école pour tous les enfants mais davantage pour ceux qui ont des difficultés !!!
Je fais tout d’abord une « recherche en cours » dans ma tête et sans remonter bien loin dans le temps je me souviens que, justement, dans une structure d’accueil où j’avais travaillé, on avait, à travers des projets ciblés, précis et personnalisés, réduit le temps scolaire des enfants qui présentaient des difficultés d’apprentissage. Ceci dans l’optique de leur permettre de développer leur potentiel dans des activités autres que scolaires, afin que cela les mette en situation de réussite et, de ce fait, impulse une motivation et transforme leur façon d’appréhender l’école.
Les résultats étaient là : cette méthode a entraîné plus d’un enfant à investir l’école d’une autre manière et au fil du temps en arriver à une scolarisation complète en fin de cycle 3 avec réussite scolaire à l’appui.
Pour ces enfants en difficulté, voire en échec scolaire, l’école était un symptôme de bien-être ou de mal-être. Leur attitude d’élève était un véritable baromètre. C’est une équipe d’enseignants spécialisés, de parents, d’éducateurs et de thérapeutes qui travaillaient ENSEMBLE pour les accompagner et répondre au mieux à leurs souffrances qui court-circuitaient sans cesse leur vie.
Cependant, ma colère est double : elle est celle d’une éducatrice mais aussi celle d’une parent d’élèves ! Avec tout le respect que j’ai pour l’école et pour les enseignants, je n’ai néanmoins jamais considéré que l’école puisse palier au rôle des parents !! Et pourtant c’est bien à cela qu’on assiste ! En tant que parent, je me sentirais bien humiliée de voir que, si mon enfant avait des difficultés à l’école,la solution pour y remédier serait de lui allonger son temps scolaire, et, par conséquent, de lui réduire son temps personnel de repos, en famille, en activités ! Mais quelle aberration !!!!! Qui peut prétendre obtenir le tiercé gagnant en jouant ce jeu-là !
Depuis quand un enseignant serait-il plus disponible, plus performant, plus à l’écoute le matin avant de commencer l’école, le soir à la fin de sa journée ou encore entre midi et deux, à l’arrache !!!!!!! Parce qu’il faut les placer ces heures, coûte que coûte il faut les coincer quelque part !
Et de la même manière, depuis quand, un enfant serait-il plus disponible et réceptif à l’apprentissage au moment de ses temps de repos, de repas, de pause ? Cela se saurait si cette façon était la bonne ! Même au collège, on délivre des heures de soutien PENDANT les heures scolaires !
Trop d’école tue l’école !
La réussite scolaire passe aussi par tous ces moments de vie de famille, tels que le jeu, les loisirs, la détente. L’école n’a pas à empiéter sur ce territoire–là et quelque soit la façon dont la famille gère et organise ce temps-là, il n’appartient pas à l’école !
Sans compter que ce procédé qui consiste à allonger le temps scolaire pour les enfants en difficulté est discriminatoire ! Comme certaines écoles de France sont « bonnes élèves » et ont déjà « obéi » aux nouvelles directives, on a vu dans certaines villes et villages des enfants rentrer chez eux en fin de journée alors que d’autres restaient en classe pour travailler encore, encore…. Imaginons seulement ce qui peut se passer dans la tête des enfants qui partent et des enfants qui restent…. Pensons–y juste un instant… Mais quel désastre…. Comment peut-on cautionner une chose pareille ? Je crains hélas que les seuls effets de toute cette mascarade ne consistent qu’à dégoûter définitivement les enfants de l’école !
Mr Darcos, de grâce, ne prenez pas les enfants en otage pour remplir l’emploi du temps des enseignants !
Un autre point important est que l’enseignant n’est pas formé pour accompagner spécifiquement l’enfant en difficulté. Son métier s’adresse à un groupe classe, riche de toutes ses interactions. On lui demande de faire ses 24 heures de classe pour tous et de changer son chapeau 2 heures durant pour enfiler celui de l’instituteur spécialisé !!!!
A la bonne heure !
De la même façon, je ne pense pas qu’il soit particulièrement judicieux de confier les difficultés scolaires d’un enfant à son enseignant habituel systématiquement !
Les RASED sont là pour prendre le relais ! Et d’ailleurs, ils ont plus que fait leurs preuves dans pas mal de régions de France….
Depuis les années 70 (GAPP) ils ont été adaptés et transformés et aujourd’hui on assiste à leur démantèlement et à leur suppression sous prétexte d’économie budgétaire !
Ceci est une insulte à l’enfant en difficulté tout comme c’en est une à tous les professionnels des RASED, ainsi qu’ aux enseignants et aux parents !
Ainsi, j’en appelle aux enseignants qui, pour répondre aux ordres de leur hiérarchie, appliquent l’aide personnalisée dans un emploi du temps qui leur permet d’être « réglos » avec le dû de leurs heures. Je leur demande de faire un arrêt sur image afin qu’ils pensent, à ce moment-là, aux enfants qu’ils sont en train d’aider !!!!!!! Soyez honnêtes avec vous-mêmes …Mettez-vous à la place des enfants…… Croyez-vous les aider vraiment ?
J’en appelle à ceux qui ont la chance d’être aussi parents : laissez votre fierté d’enseignant au parloir …. Regardez simplement ce que vous seriez prêts à accepter ou refuser pour VOTRE ou VOS enfants de la part de l’école… Jouez le jeu….Juste un instant… Imaginez que c’est votre petit qui travaillera pendant la pause méridienne… Pensez que c’est lui qui restera le soir quand les autres partiront ou iront en récréation…. Que c’est lui que vous réveillerez le mercredi matin pour aller encore à l’école alors que l’an passé, vous adoriez les mercredis pour justement laisser le temps aux enfants de « souffler », de faire une pause dans la course de la semaine….
Ce que vous n’accepteriez pas pour votre (vos) enfant(s), pourquoi l’accepteriez-vous pour les enfants des autres ?
Le système tel qu’il s’annonce va tellement droit dans le mur que, je ne peux m’empêcher d’imaginer que cela permettra, après le constat d’échec de l’aide personnalisée, de définitivement écarter les enfants en difficulté du cursus « normal » et d’organiser légalement une école à 2 vitesses. Les classes d’enfants à la traîne et les autres… Ou, vu sous un autre angle, une école d’élite et le reste ????
Et la limite, QUI la définira ? Mais peut-être bien vous, enseignants qui acceptez cela!!! Préparez-vous à un festival de nuits blanches !!!! Que de terribles cas de conscience en perspective. Sans compter qu’au bout d’un certain temps, les parents pourront vous demander des comptes quand ils constateront que leurs enfants n’ont fait aucun progrès….
Mais quel gâchis !
J’en appelle aussi aux parents pour qu’ils se réapproprient leur rôle et leur place auprès de leurs enfants ….
NON…. L’école n’a pas à envahir le terrain familial….
NON, l’enseignant n’est pas tout-puissant au point d’avoir lui seul le pouvoir sur la réussite scolaire de votre enfant …
Soyons réalistes, parents !! On nous prépare à un retour en arrière de l’école ! C’est cousu de fil blanc cette affaire !
POURQUOI est-ce que l’aide personnalisée est déjà appliquée dans la plupart des écoles de France (dans le fiasco certes… ) alors que souvent, ces mêmes écoles pensent foncièrement qu’elle est aberrante et discriminatoire ?
POURQUOI est-ce que les écoles ne réfléchissent pas plus à l’enjeu et aux conséquences d’une telle réforme ? Ou, si elles le font, pourquoi ne le font-elles pas ouvertement ?
Est-ce tellement énigmatique de penser D’ABORD aux enfants ?
Serrons-nous les coudes et refusons en bloc ! Face à la solidarité, aucune loi ne fait le poids !
Et dites-vous qu’il n’est JAMAIS trop tard…..tant que nous sommes vivants ….
Ecrit en octobre 2008
par une parent d’élèves
mercredi 17 décembre 2008
Lettre d’une mère de famille
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2 commentaires:
hum! J'ai lu rapidement l'article. Je suis dans une situation particulière. je suis mère célibataire. Ma fille avait quelques difficultés scolaires, elle a donc un soutien scolaire en math. Et je suis désolée, mais ça se passe tres bien. Elle fa fait beaucoup de progrès, ne le vit absolumet pas comme une punition mais comme un plus. Les enseignants tâchent de s'organiser. Bon..à l'arrache parce que ca leur a été imposé à la rentrée. Donc l'option en cours, c'est que chaque enseignant traite les soutiens ds sa matière de "predilection". Ce n'est que mon vécu personnel. Je ne suis pas sure que les parents soient les bonnes personnes pour s'occuper du soutien scolaire. En ce qui me concerne, je suis crevée te je n'ai absolument pas la patience ou tout simplment la pedagogie. Alors, cette lettre, je la prends avec des pincettes. Concernant les RASED on es tous d'accord neanmoins.
Nathalie, merci pour ton commentaire.
Je comprends que, personnellement, cette aide personnalisée soit un confort pour toi et pour ta fille, à qui son professeur peut dorénavant prêter plus d'attention.
Cependant, cautionner ce système, c'est, à mon avis, dénaturer le rôle de l'Education Nationale. On réduit les budgets, on réduit les effectifs. Résultat : des classes surchargées, des élèves à la traîne, qui doivent revenir, en dehors du temps scolaire, rectifier le tir là ou l'école, dans le temps qui lui a été imparti, a échoué.
Tsss Tsss... On marche sur la tête là.
Sans parler du fait que cette "aide personnalisée" laissera nombre d'enfants sur le carreaux qui, auparavant, étaient pris en charge et réintégrés dans leur cursus scolaire, sur le temps scolaire justement, grâce aux RASED.
Maintenant, il est peut être évident que sans la politique d'"éradication programmée" des RASED, ta fille n'aurait pas bénéficié de cette aide, et c'est toi qui aurait dû y pallier, soit sur ton temps, soit sur tes sous.
Le problème, c'est que comme tu le dis, ce n'est pas aux parents d'y pallier.
En résumé, c'est simple : plus de sous, plus de postes Monsieur le Ministre svp.
Voilà pourquoi j'ai publié la lettre de cette mère de famille, voilà pourquoi je soutiens son propos.
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